Par delà le Continent

Plus encore que Jeanne du Barry, Le Retour de Catherine Corsini porte ironiquement bien son nom : il retourne d’une mise à l’écart de la sélection officielle en raison des accusations de harcèlement de la part des actrices, mineures. Polémiques, drames, enguelades … Le nouveau long-métrage de Catherine Corsini est bien en lice pour concourir à la Palme d’Or, vingt deux ans après Répétition (2001) et deux ans après La Fracture (2021). Dans ce que je jugerais aisément comme mon film préféré de Corsini, on retrouve à la fois l’exploration des problèmes sociaux subis dans la chaire de ceux qui le vivent, à savoir ici Khédija (Aïssatou Diallo Sagna, déjà présente dans La Fracture) qui mène seule l’éducation de ses deux filles en Corse du Nord, mais on retrouve aussi l’exposition d’une vraie situation inextricable qui partage le spectateur. Ce dernier peut à la fois être pris d’empathie pour la mère de famille, malgré sa faut révélée à la fin du film, mais aussi comprendre la famille corse qui souhaiterait davantage voir les enfants. Un drame personnelle qui illustre les fractures sociales, avec le personnage de Jessica (Suzy Bemba) qui va devenir une transfuge de classe, grâce à ses brillants résultats qui lui donneront des ailes et des mots crues sur sa famille. « Vous ne me méritez pas. » écrit-elle sèchement dans son journal intime, dont sa soeur Farah (Esther Gohourou) tombe nez à nez, et qui lui décochera une larme sur sa joue gauche. La rencontre sociale s’illustre par l’amitié entre Jessica et Gaia (Lomane de Dietrich), camarade de classe qui va l’inviter dans sa luxueuse demeure, vue sur la côte. Admise à Sciences Po pour sa première année d’études postbac, Marc (Denis Podalydès), le père de Gaia, va se prenne d’affection pour Jessica, symbole de la réussite et de l’ascenseur sociale qu’il promeut. Sa fille Gaia va néanmoins jouer le rôle de personnage piston, en conflit avec son père qui aime à se gargariser sur ses relations « Ce ne sont pas des enseignants mais des intervenants ponctuels ». En somme, Catherine Corsini réussit son double pari de film social et de fresque sur un pan de la société corse, ou du moins d’une part de réalité sur ce qu’il se passe par delà le Continent.