Le Roi
Le Roi

Film de Pierre Colombier (1936)

Mais il y a peu de chances qu'on détrône le roi des ...

Peut-on pardonner à un film son inanité formelle et le quasi-amateurisme de la moitié de sa distribution ? On va se gêner…


La Cerdanie rejoint la Sillistrie d’Education de prince en tant que pays de l’est imaginaire et certainement un peu ridicule. Mais, comme dans le sus-nommé, plus ridicules encore sont ces Français qui, avides d’affaires à faire avec ces contrées autocrates, se couchent, littéralement, au pied et dans le lit des dits autocrates.


Nous avons ici Raimu en député « socialiste », évidemment tant que le socialisme peut servir son avancement, qui, marié à Gaby Morlay (c’est la partie science-fiction), connaît néanmoins le besoin d’entretenir comme maîtresse la cerdanienne et ancienne « actrice » Elvire Popesco.


Elvire, que le roi de Cerdanie (l’affreux Victor Francen, déjà pas bien brillant dans le mélodrame, ici proprement infect dans un, il est vrai piégeux, rôle avec accent pour rire) est tout heureux de retrouver lors de sa visite officielle, lui qui l’avait connu autrefois dans leur contrée commune.


Renouant avec leurs anciennes pratiques, le roi et l’actrice agacent un peu notre Raimu de député, quelque peu marri de se faire ainsi souffler sa poule. Mais l’homme sait vivre, et entrevoit déjà les éventuelles retombées de telles retrouvailles sur la suite de sa carrière.


C’est ainsi que notre bon roi fait la connaissance de madame Raimu, l’assez délicieuse (à mon goût, si vous permettez) Gaby Morlay, et l’on sait tous ce que peut vouloir dire connaître. Comme de bien entendu, Raimu, tout outré, saura se consoler avec un tout nouveau maroquin de ministre obtenu grâce aux intercessions du Prince.


Tout cela a l’air bien boulevardier, et bien rassurez-vous, ou tremblez, cela l’est. Colombier, avec le sujet en or de Ces Messieurs de la santé, avait déjà montré ses limites, qu’il ne repousse pas ici. En plus du fâcheux Francen, les seconds rôles sont tous plus approximatifs les uns que les autres. Le tout ne dépasse pas la farce un peu rance des années 30.


Et pourtant… Il y a deux éléments qui aiguisent ma manie de surnoter. Raimu bien sûr, qui comme Fresnay ou Jouvet fait bien gagner trois points à n’importe quoi, et la pas si gentille que ça critique de l’opportunisme politique, tant à gauche qu’à droite, notamment lors de la confrontation de notre député avec le marquis de Chamarande (l’assez sympathique, lui, André Lefaur), autre « ami » de Popesco, avec qui il concrétiserait bien l’union nationale en mariant sa roturière rejetonne avec son noble rejeton.


Devant les réticences de la vieille France à une pareille union, il lui fait alors remarquer : « Vous êtes antisémite, vous ne manquez pas une chasse du comte Isaac, ni un dîner du baron Moïse. Vous êtes catholique, mais vous n’êtes pas chrétien. Vous êtes nationaliste, mais tous les vôtres s’efforcent d’épouser des milliardaires exotiques. Et bien plus j’y pense, plus je me dis que vos aïeux, s’ils vous voient, doivent faire une bien drôle de tête ».


Vous ferez comme vous voudrez, mais les dialogues de ce genre m’aident quant à moi à digérer bien des mauvais plats.

Duan

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