Ce film cruel, lyrique et visuellement somptueux figure parmi les dernières créations de l'Oeuvre prolifique de son auteur. Une fois encore Rainer Werner Fassbinder évoque les retombées de l'Histoire de son pays, en signant un mélodrame pour le moins chargé en termes de désillusions socio-politiques. Le secret de Veronika Voss, au gré de sa lumière aveuglante et surexposée, dépeint avec un remarquable sens de la synthèse la petite et la moyenne bourgeoisie : d'une part une actrice avide au passé moralement trouble, d'autre part un modeste journaliste sportif attiré par les charmes vénaux de la comédienne, enfin une doctoresse machiavélique aux agissements criminels...
Si le film s'avère ici moins palpitant que le précédent Mariage de Maria Braun et qu'il prend le temps de présenter la figure de Veronika Voss et celle de son prétendant la dernière demi-heure dévoile insidieusement sa redoutable noirceur ; en mettant sur la sellette la sphère psychiatrique qu'il filme sans concessions Fassbinder montre à nouveau une humanité froide, anesthésiant ses modèles ( ici les stars de cinéma, acoquinées auparavant à l'industrie cinématographique d'un certain Goebbels ), tout ceci au nom de l'argent et du confort matériel. Jouant la carte de l'intimisme Le secret de Veronika Voss induit son propos de manière absolument magistrale, conférant à ses personnages une dimension universelle voire même emblématique.
Le Noir et Blanc du film, jouant davantage sur un éclairage dur et contrasté, évoque parfois la cruauté plastique des travaux de Sven Nykvist ( on pense beaucoup au Persona de Bergman, chef d'oeuvre déployant la relation liant une actrice à son infirmière ). On retrouve au générique bon nombre des acteurs fétiches du cinéma de Rainer Werner Fassbinder, accompagné une fois encore du talentueux Peer Raben à la musique. Un grand film.