Frog Dreaming intéresse pour la greffe, au sein d’une forme hollywoodienne faite de références aux succès de l’époque, de E.T. (Steven Spielberg, 1982) aux Goonies (Richard Donner, 1985), d’un imaginaire typiquement australien par le prisme d’un mythe prêtant son titre au long métrage, associé à la créature nommée Bunyip. Il s’agit, dès lors, d’explorer les profondeurs d’une terre hantée par une ère industrielle reléguée au statut d’antiquité et cachée dans des espaces désaffectés ou sous l’eau, et dont les épaves sont converties par l’imaginaire soit en supports de jeu – voir cette pièce cylindrique dans laquelle se glisse Cody – ou en monstres terrifiants, déclinaison métallique du Loch Ness.
La métaphore archéologique et culturelle conduit à un isolement progressif du jeune héros, d’abord intégré au sein d’une petite bande de trois amis, rapidement raccordé à la solitude d’une condition de chercheur similaire à celle de l’Aborigène qui jalonne, sous différentes formes, son parcours initiatique. Il lui faut accepter cet état de dépouillement et accueillir en lui les vestiges d’un temps passé qui refuse qu’on l’oublie ; dès lors, l’acte de désobéissance aux adultes, s’il semble emprunté à la vision de l’Amérique et d’une parentalité défaillante chère à Stephen King, renvoie davantage à l’idée que ces derniers ont imposé une sorte de damnatio memoriae qui empêche leurs enfants de s’élever parce qu’ils ne connaissent pas leur histoire, ne sentent plus leurs racines. Le montage ne cesse d’articuler des plans sur les personnages avec d’autres sur la faune et la flore, remédiant ainsi à cette dénaturation qui menace à chaque instant d’engloutir les endormis – la séquence d’ouverture s’avère explicite. Les incursions dans le fantastique, légères mais réussies, figurent cet autre monde, ce monde des esprits auquel seul un travail sur soi donne accès.
Une curiosité intelligente portée par la belle partition de Brian May.