Cela s’annonçait pourtant assez mal, avec de lourdes menaces en surplomb.
Avec le souvenir pénible du consternant Samba et de sa démagogie nauséeuse.
Avec la perspective d’une comédie « à la française » (certes dotée de moyens conséquents), ses gags vus et revus, étirés jusqu’à la corde – avec aussi, au passage, un « message » politico-social ; et de fait on n’y coupe pas, entre travailleurs clandestins (bis), cotisations usurières, tyrannie de l’inspection du travail, une manière de plaidoyer pro domo (l’entreprise de mise en scène événementielle pilotée par Jean-Pierre Bacri est sans doute une projection de celle de Nakache et Toledano), par chance la séquence est très brève.
Avec aussi des comédiens confinés dans leurs emplois habituels, dans leurs tics et leurs trucs, vus et revus, Bacri au centre, grognon évidemment mais pas sans tendresse, Vincent Macaigne dépressif et lunaire, Gilles Lellouche confit en vulgarité et en beaufitude du côté de Sébastien Patoche. Cela dit, et cela devient alors positif – le récit ne brode pas autour des traits les plus stéréotypés des comédiens, mais dans une perspective opposée il leur offre un cadre très écrit, des dialogues très soignés dans lesquels ils pourront apporter ce qu’ils font le mieux.
Des menaces sans doute, mais …
Le duo des réalisateurs prend le risque, considérable, de s’attaquer au film choral – et d’autant plus que le maître du genre, Robert Altman, avait précisément consacré un de ses premiers essais à un … mariage. Et grâce à un montage parfaitement maîtrisé, le récit obtenu est à la fois fluide et dynamique, personnages (même si les individualités ne sont pas vraiment fouillées), événements, espaces se succèdent, s’insèrent, s’enchaînent avec une réelle aisance - pari gagné.
Bien plus encore le spectateur finit par se laisser prendre par l’ambiance du film, effectivement festive, immersive même et il doit finalement admettre qu’il est en train de passer un bon moment.
Et c’est d’autant plus évident à mesure que le film progresse, après un début sans doute hésitant (un prologue assez facile et presque hors sujet) – jusqu’à un final flamboyant et en plusieurs temps.
On aura ainsi droit à des feux d’artifice aussi peu maîtrisés (par les protagonistes) que brillants ; puis à l’ultime spectacle offert par le commanditaire de la soirée, le marié en personne, personnage insupportable, pédant, bouffi d’orgueil (et dont la silhouette évoque, assez irrésistiblement, l’actuel premier ministre de la France ; et il y a gros à parier que ce rôle va constamment coller, pour le meilleur ou non, à son interprète, Benjamin Lavernhe) : on verra ainsi son envolée aviaire, son atterrissage avorté, son nouvel envol hors tout contrôle dans un très beau plan d’ensemble nocturne, jusqu’à sa chute, méritée et hors champ. Et cela finit par s’avérer plutôt réjouissant.