Même si le long-métrage a une apparence visuelle similaire à celle d’un film policier, Le septième juré est une œuvre complètement hallucinante, avec un scénario qui nous capte par sa finesse et sa qualité d’écriture scénaristique irréprochable. L’œuvre s’ouvre sur un simple et abrupt meurtre, monté en silence et nous agrippant comme un rien par la voix off du protagoniste principal. Inspiré d’un roman écrit par Francis Didelot, un écrivain expert dans l’écriture des romans policiers, le long-métrage nous fait plonger dans une situation totalement inattendue et très différente des réalisations du même genre, celle de l’agresseur choisi comme juré dans le cadre d’un procès conduisant un voyou innocent d’être jugé. Dans ce cas, peut-on parler d’un système corrompu ?
D’un côté oui mais d'un autre, la réponse serait négative pour les personnages du film. Au tribunal, on juge ce qui peut être prouvé et non pas ce qu'il s'est produit. Ici, un homme a été choisi pour être coupable et doit affronter les nombreuses épreuves judiciaires qu’il attend. Du coup, l’agresseur peut profiter de cette magnifique opportunité pour faire condamner un homme à sa place et vivre sa vie comme il le souhaite. Mais ce n'est pas comme ça que les choses vont se dérouler. Bien au contraire, l’assassin, éprouvant de la pitié à l'accusé, va encore plus renforcer son secret meurtrier en usant à fond des des lois qui peuvent être favorables pour lui, tout en cherchant à tout prix à sauver le voyou d'une odieuse et prochaine condamnation. Et c’est qu’il est prodigieux chez lui, c’est qu'il prend carrément la parole la majorité du temps. On peut oublier les autres jurés, l’avocat, et même le juge. Ils n'existent plus. Ça se règle seulement entre le juré, les témoins et l'accusé.
Il peut aveugler tout le monde par ses belles paroles, il serait difficilement accusé du meurtre tant il manipule aisément le système judiciaire.Toute l’importance du film se porte uniquement sur la puissance et la volonté du personnage principal à se surpasser, à nous surprendre et à nous démontrer que même avec les preuves présentées lors du procès, on peut encore prouver l'innocence d’un accusé. Ce protagoniste est campé par un Bernard Blier étonnant et magique. Il a pourtant le physique d’un agresseur mais en étudiant bien sa bonne bouille, il ne ferait pas mal à une mouche. C’est très accrocheur ce genre de contexte, tout est chamboulé, le procès ne se déroule même pas de manière habituelle. Le réalisateur, Georges Lautner, icône phénoménale de la comédie française, nous donne la motivation suffisante pour visionner son film d’un œil très attentif.
Il tenait un sujet à la fois délicat et fascinant à exploiter, il l’a fait sans le moindre accroc. Il décrit son personnage avec beaucoup d’humanisme, en nous faisant prendre conscient que son acte est dû à un manque de maîtrise en soi, une erreur humaine tout simplement. De plus, le cinéaste avait un avantage avec son scénario, mettre son personnage dans une très mauvaise position, en se mettant à l'opposition des habitants de sa propre commune et ça, c'est plutôt bien traduit. Le ton est grave et désuet, on nous fait plonger dans une ambiance judiciaire comme on en a jamais vu, tout en l’animant comme un documentaire fortement enrichissant, avec des plans de caméra nous agrippant comme dans du beurre. Je dois dire que j’ai été agréablement surpris par ce drame psychologique d’une sublimité révolutionnaire, un must du réalisateur français, avec une fin qui prend une tournure assez particulière. 8/10
Pendant le procès, j’ai cru que vous étiez mon avocat !