J’avais vu le début du Smoking quand j’étais gamin, et j’avais déjà trouvé ça bête et de mauvais goût, c’est dire. Ensuite ma mère-grand avait éteint la TV, jugeant probablement qu’un spectacle d’une telle bêtise aurait un mauvais effet sur moi. Il faut savoir quand même que j’avais regardé Blade II chez elle, et en sa présence.
Malheureusement, étant devenu depuis fan de Jackie Chan, je savais qu’un jour je devrais voir Le smoking en entier. J’ai attendu d’être accompagné d’un comparse tout aussi fan de l’acteur, qu’on soit accablés ensemble.
Jackie incarne une sorte de beauf sans éducation, un peu vulgaire sur les bords, qui parle de la fille qui lui plaît en disant que penser à elle lui en fait mettre "plein son lit" ; un rôle qui lui va aussi mal que ce bouc qu’il arbore au début du film, ou ce t-shirt Hooters (le bar à serveuses à grosses poitrines, parodié dans South park). Jimmy Tong, tel est son nom, n’y connaît rien en kung-fu ; son talent c’est de pouvoir conduire ses clients n’importe où à une vitesse record, à bord de son taxi. Il passe par les petites ruelles, roule à contre-sens et en marche arrière, se gare devant l’entrée d’un immeuble, … eh ouais, c’est triste, on croirait voir Jackie dans Taxi de Besson…
Le héros se retrouve employé comme chauffeur par Clark Devlin, un playboy millionnaire qui s’avère être un espion, qui tire tout son talent de son smoking ultra-sophistiqué, qui lui permet de tout faire. Quand il danse, il glisse comme s’il était sur la banquise, et il se contorsionne comme s’il était dans la Matrice, mais personne ne se pose de questions.
Suite à un accident, Devlin change de nom sur sa carte d’identité avant de perdre conscience (je pensais qu’il était l’équivalent d’un Bruce Wayne ; changer son nom va éviter qu’on le reconnaisse ?) et demande à Jimmy de porter sa tenue à sa place. Donc c’est le chauffeur qui prend le relai de la mission en cours de Devlin, sans rien savoir de ses tenants, et sans même prévenir l’agence (nommée CSA, comme c’est drôle).
De toute façon l’intrigue/l’enquête n’a rien de bien compliqué. Accompagné de Del Blaine, incarnée par Jennifer Love Hewitt, Jimmy fouine un peu, mais on a l’impression que tout leur tombe tout cuit dans le bec.
En gros, pour que tout le monde achète sa marque, le dirigeant d’une société d’eau minérale décide de contaminer les ressources d’eau potable avec une bactérie qui déshydrate complètement le corps humain. Que c’est con. Je précise qu’ils ont été 5 à travailler sur le scénario.
Entretemps, Jimmy gaffe beaucoup, et découvre les fonctionnalités de son costume. On se croirait dans un croisement entre The mask et Incontrôlable de Michael Youn : s’enchaînent à un rythme effrené les gags cartoonesques d’une bêtise aberrante, histoire de détruire nos neurones à vitesse grand V ; apparemment le smoking a une fonction pour démolir tous les objets dans une pièce, ou pour danser le mambo. On a même une séquence "habillage" qui rappelle les Batman de Schumacher (tout comme certains morceaux de la BO), sauf qu’à la place du plan fesses, on a un plan braguette, qui se ferme toute seule (faut que je pense à en faire un gif).
Les cascades avec le smoking ne sont même pas intéressantes, c’est dingue mais il y a un usage flagrant de câble en permanence ! A chaque saut, à chaque pirouette, on sent l’acteur porté par des câbles retirés numériquement. Et concernant les autres cascades, ça n’est jamais filmé de sorte à ce qu’on soit sûr que ça soit bien Jackie, ou alors on ne voit pas son corps en entier, ce qui fait que ça peut être truqué. Quelle utilité de faire appel à Jackie Chan dans ce cas ? C’est juste pour avoir son nom sur l’affiche ?
Il y avait une idée intéressante, qui est que le héros ne porte que son pantalon de smoking et ne peut se défendre qu’avec les pieds, mais l’action souffre toujours des défauts évoqués, ou alors Jackie se contente de remuer sa jambe dans le vide et les ennemis font semblant d’être frappés.
Mais même si ça avait été bien chorégraphié, ça aurait été mal filmé et mal monté.
Kevin Donovan (qui heureusement n’a fait aucun autre long-métrage depuis) croit que c’est trop bien de multiplier les angles de vue, de couper sans arrêt, que ça donne un côté cool. Le smoking est d’ailleurs pleins d’effets censés être cools : montage énergique sur du hip-hop ou de l’électro, CGI inutiles, cadrages à la Pitof, … mais que c’est ringard…
D’ailleurs la séquence du générique de début se veut cool aussi, en représentant à la Fight club une idée qui indique de suite le niveau d’humour du film : une biche pisse dans une rivière, et on suit le cheminement de l’urine jusqu’à son traitement pour que l’eau soit potable. J’avais peu de souvenirs de mon premier visonnage, mais ça, je m’en souvenais.
L’humour du film est d’un gras bien Ricain, et ça tourne essentiellement autour du cul. C’est totalement gratuit, par exemple pendant que Del Blaine est à un stand de tir, un employé zoome sur son cul avec la caméra de sécurité. Non seulement les gags sont nuls et prévisibles, mais en plus particulièrement portés sur la misogynie. Une réplique, balancée comme ça, avec sérieux, à propos du premier rôle féminin : "elle doit se faire placer un filtre entre le cerveau et la bouche la semaine prochaine". Quoi ?
Il y a une séquence qui n’existe que pour un unique gag, totalement pourri : Jimmy a rendez-vous avec Del Blaine et le code de reconnaissance est "c’est de la poitrine !". Alors forcément, le héros se trompe de personne, et puis finalement le rendez-vous est décalé à un autre moment. Putain, ça valait le coup de nous montrer ça…
On a vraiment pitié pour les deux acteurs principaux, qui se ridiculisent pour des gags pas drôles.
Mais de loin, le passage qui m’a le plus atterré, c’est quand Jackie remplace James Brown à un concert (bon, voilà, quoi…) et se met à remuer le cul pendant des plombes devant le visage du méchant, et devant la poitrine de sa fiancée. Ca semble durer une éternité, c’est à croire qu’on a voulu que Jackie fasse du Ace Ventura soudainement…
C’était vraiment de la pure merde. Probablement le pire Jackie Chan que j’ai vu (mais La mission fantastique n’est pas loin)
Je m’attendais à un mauvais film, mais je ne pensais pas être à ce point accablé. Et il n’y a même pas une seule bonne cascade.
J’ai essayé de réfléchir à une seule chose bien que je retire du Smoking. Bon, il y a l’idée de noyer un type avec une poche qui recouvre sa tête et se remplit d’eau, je crois que c’est le seul truc que j’aie vraiment apprécié au premier degré. Parce que sinon, il y a aussi ce figurant qui joue un videur, qui n’apparaît que pendant une seconde, mais a une gueule si improbable qu’on dirait une marionnette des Guignols de l’info : http://www.dvd.net.au/movies/t/08050-1.jpg
Je n’ai pas été capable de retrouver son nom, malheureusement.