Cantonné à un indiscutable anonymat chez nous, Le Soldat Inconnu demeure le plus gros succès dans son pays d'origine qui est la Finlande, soit l'une de ces nations européennes au cinéma assez peu connu. Ayant aussi vu la seconde Guerre Mondiale se produire sur son sol, il fallait bien qu'un film sur cette période sombre de l'histoire du pays voit le jour. Se pose alors la première question qui est de savoir si un film de guerre de 3h sur un pays qui ne s'est pas vraiment illustré dans l'histoire du conflit international est judicieux. Vient ensuite la seconde question, la plus importante en l'occurrence, qui est de réfléchir sur les moyens d'un tel projet au sein d'une industrie cinématographique qui ne pouvait (et ne peut toujours pas) nullement rivaliser avec les titans du Septième Art. Il est vrai qu'il faut être compréhensif sur ce point mais moi je suis d'avis de dire que quand on a trop d'ambition et pas assez de moyens, alors on revoit son cahier de charges. Chose que Edvin Laine n'a pas fait.
Après, peut-on lui en vouloir de tenir à rendre hommage aux héros passés ? Bien sûr que non et c'est même tout à son honneur. Toutefois, à notre époque, on ne peut que poser un amer constat qui est que Le Soldat Inconnu a très mal vieilli tant on voit le manque de moyens se faire sentir. On sait multiplier les très belles scènes d'explosions tonitruantes mais on est incapable d'offrir un rendu correct des soldats tués au front, s'effondrant sans qu'aucun impact de balle ne soit visible. Ca fait tâche et surtout amateur ! Pareillement aussi pour les séquences de guerre dont les plus étendues sont constituées d'un assemblage de scènes façon documentaire. Aucune précision sur la situation sur le terrain, sur le moral des troupes à cet instant. Rien ! De quoi atténuer notre attachement envers ces bidasses indisciplinées qui galèrent un peu à se démarquer. Encore un point négatif !
Et puis, surtout, le film est bien trop long pour ce qu'il a à raconter. La colonne vertébrale du récit n'étant constituée que de quelques escarmouches sans grande envergure et sans qu'il n'y ait quasi jamais d'ennemis montrés à l'écran. Les combats manquent de punch, de mouvements. Ils ne sont pas hargneux et sans pitié, ni ne retranscrivent les horreurs de la guerre. Et entre deux fusillades, ça parle et parfois pour ne rien dire. On claque à plusieurs reprises de la morale sur la discipline et le courage alors que se taire ou à la limite le dire une fois si on tient absolument à être bavard aurait été bien plus judicieux. L'histoire de ce peloton n'en est pas une, ne comporte aucun objectif clair et défini, même quand la défaite devient inéluctable et qu'une dernière ligne de défense par pure symbolisme patriote aurait pu être une idée très intéressante à mettre en scène pour rattraper le coup. Le peu de convictions des soldats dans l'absurdité de la guerre est davantage retranscrite comme un je m'en foutisme puéril.
Ce qui sauvera d'un iota Le Soldat Inconnu se fera sur un superbe noir et blanc qui renforce indubitablement la beauté des décors naturels. Sans ça, le fiasco aurait été une triste conclusion. Après, comme j'ai dit, la Finlande n'a pas une trésorerie mirobolante pour réaliser de grandes et impressionnantes fresques donc ça jouera aussi sur une note finale magnanime.