Là-haut

Il paraît que Le Sommet des Dieux serait l'adaptation d'un manga riche et foisonnant.

Il paraît que Le Sommet des Dieux serait réalisé par un français qui a bossé, par exemple, sur l'animation de Ernest et Célestine ou sur Avril et le Monde Truqué.

Sauf que tout cela, je ne le savais pas en entrant de la salle, preuve supplémentaire de mon ignorance.

Mais preuve, aussi, de la polyvalence du style de Patrick Imbert, cette fois-ci seul aux commandes de l'entreprise.

Preuve enfin de la curiosité pour une fois avisée du masqué qui, s'il sera incapable de vous causer de la fidélité du film au matériau d'origine, pourra cependant vous dire que Le Sommet des Dieux, c'est formidablement bien et qu'il faut y aller si d'aventure votre salle se risquait à quelques projections.

Parce que l'oeuvre se montre bien plus que la représentation d'une simple ascension qu'elle aurait pu être en d'autres mains. Car elle commence comme la recherche d'un fantôme et du temps passé, celui des pionniers de l'alpinisme et de leurs exploits, parfois au prix de quelques doigts ou, bien plus, de leur vie.

L'animation se transforme donc peu à peu en film d'enquête sportif, avant de prendre le virage, à mi parcours, d'une incroyable épure tutoyant les cieux. Car finalement, le fil rouge tendu jusqu'ici se relâche, pour suivre les pas d'un alpiniste à cheval sur trois temporalités, entre histoire avec un grand H de la discipline, souvenirs et blessures de jeunesse et un dernier défi à relever.

En osant s'aventurer sur le terrain de moments de tension savamment entretenus, rencontrant la lisière du fantastique et d'images horrifiques.

Le tout avec une fluidité et une tranquillité de chaque instant oscillant entre la majesté des larges décors de montagne et l'intériorité des personnages face à leurs limites et leurs failles. Ainsi, rarement film d'animation aura fait ressentir de manière si fine la solitude dans laquelle on s'enferme mentalement et la volonté que l'on met à l'épreuve, ou encore le sentiment de s'abandonner sans retenue.

Et jamais film d'animation n'aura réussi de manière aussi remarquable à mettre des mots sur la force motrice de la passion, tout en en préservant le mystère, la raison et l'absolu. Un carburant qui consume et pousse à constamment se dépasser. Le tout sous l'oeil journalistique d'un appareil photo, témoin d'une odyssée en forme d'éloge funèbre placé sous le signe d'un apaisement étonnant.

Des photos capturant le gigantisme et le vertige, une sorte d'infini immaculé dans lequel l'homme, si minuscule finalement, ne peut que disparaître.

Behind_the_Mask, blanc comme neige.