Je vais avoir du mal à trouver des mots pour dire exactement ce qui m'a déplu dans ce film.
D'abord, j'admets ne pas avoir été séduit par les dessins de l'ensemble. Certes, il y a quelques bonnes idées, mais la plupart d'entre elles me semblent désespérément sous-exploitées. On peut notamment regretter le manque de diversité graphique des différents personnages. Il aurait pu être intéressant et amusant de donner vie à des protagonistes issus de plusieurs courants artistiques (néo-classicisme, romantisme, impressionnisme, cubisme etc.), ce qui aurait pu donner lieu à des moments de surprise et de comédie, tout en confiant une identité propre à chaque personnage, un élément tristement absent du film...
Car c'est surtout au niveau scénaristique que le bât blesse. Passons rapidement sur le synopsis: il s'agit ici d'une lutte classique entre dominants et dominés: les "Toupins" d'un côté, les "Pafinis" et les "Reufs" de l'autre. Jusque-là, rien de choquant, mais rien d'innovant non plus. Les principaux reproches que je vais adresser concernent davantage les péripéties et la fin de l'histoire que le postulat initial.
D'abord, il y a un nombre insupportable d'incohérences et/ou de non-explication que je vais livrer ici rapidement:
On ne comprend pas comment les "Toupins" parviennent à exercer leur domination sur les deux autres groupes. On ne sait pas pourquoi la forêt interdite a une aussi mauvaise réputation, alors qu'elle ne fait jamais preuve d’agressivité tout au long du film. On ne nous explique jamais d'où vient la capacité des personnages à sortir et à entrer dans différents tableaux, et dans ce cas, comment se fait-il que les autres personnages (comme les cavaliers poursuivant Magenta et Lola) n'y parviennent pas? Pourquoi le personnage avec la tête de mort se met-il à poursuivre Plume seulement à partir du tableau vénitien, et comment se fait-il qu'il disparaisse simplement en se faisant poussé par Magenta?
Autant d'éléments qui pourraient être anodins et seraient même rapidement oubliés s'il n'y en avait qu'un, mais qui, du fait de leur omniprésence, deviennent rapidement insoutenables.
Mais la plus grande critique que j'adresse à ce film, celle-là même qui m'a poussé à rédiger cette critique, c'est sa fin. Initialement, l'objectif des personnages principaux est de retrouver le peintre afin qu'il revienne un jour pour terminer son œuvre. On peut considérer que cette espérance est assez classique: les personnages sont dans l'attente d'un pouvoir "divin", seul capable de parachever son œuvre imparfaite.
Sans être hostile à ce genre d'idée, je dois admettre que je ne me sentais pas transcendé par cette perspective. Je m'attendais à ce que le film donne une leçon de morale du genre: "Peu importe les différences, vous êtes tous des personnages issus de l'imagination du peintre, aimez-vous les uns les autres" et tout ce qu'on connaît...
Mais à la place, la solution trouvée par les personnages m'a - je le reconnais - fortement dérangé. En fait, les personnages principaux ramènent de la peinture dans leur tableau et invitent l'ensemble des "Pafinis" et des "Reufs", à se peindre eux-mêmes, pour devenir des "Toupins". Ce serait donc ça, la morale de cette histoire? Quand on est différent et rejeté, il faut absolument tendre à la perfection telle qu'elle est incarnée par les dominants? Voilà pour l'uniformisation.
Et surtout, lorsqu'on estime que la situation dont nous héritons à la naissance ne nous convient pas, on peut tout à fait choisir de qui l'on veut être et qui l'on va devenir, sans avoir la moindre considération pour sa nature initiale? Et ça, c'est pour le libre arbitre.