Critique contenant des spoils
Bienvenue dans le tableau. Nous pouvons y voir trois classes sociales : ceux qui ont été entièrement peints, et que l'on appelle les Tout-Peints ; ceux qui n'ont été que partiellement peints, et que l'on appelle les Pas-Finis ; et ceux qui ne sont que des esquisses, les Rough.
Cette apparence finie ou inachevée instaure une hiérarchie sociale, les Tout-Peints se croyant supérieurs car favorisés par le Peintre. A ce titre, ils refusent aux autres l'accès de leur château et clament haut et fort leur dégoût pour les classes "inférieures". Au milieu de tout cela, il y a Rameau, un Tout-Peint, qui fricote avec Claire, une Pas-Finie dont le visage n'a pas été colorisé.
Esthétiquement, Le Tableau est un petit régal. Laguionie s'amuse, mêlant de nombreuses références à divers peintres, de Modigliani à Chagall en passant par le père Renoir. On peut d'ailleurs s'amuser à rechercher les clins d'oeil esthétiques.
Le travail visuel est vraiment très soigné, en particulier avec un mélange de techniques différentes (animation traditionnelle, 3D, images de synthèses, incrustations dans des prises de vue réelles...).
Quant à l'histoire... Il s'agit, a priori, d'une histoire sur l'injustice de la classe dirigeante, façon Metropolis. Cependant, on y retrouve des thèmes déjà employés par Laguionie, entre autres dans Le Château des Singes. L'idée d'une verticalité, qui sépare deux mondes qui s'opposent à cause de préjugés stupides (préjugés qui servent bien une classe dirigeante et permettent de la maintenir au pouvoir), est au centre des deux films. Finalement, le but du tableau, c'est d'emmener les Pas-Finis et les Rough, qui sont en bas, à être acceptés au Château.
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Ce que l'on pourrait finalement reprocher au projet, c'est sa conclusion : si les classes inférieures sont acceptées, c'est parce qu'elles ont réussi à se peindre, à se finir. Finalement, elles remplissent les conditions exigées par les dirigeants : elles sont entièrement peintes. Je trouve un peu dommage de prôner ainsi la disparition des différences, plutôt que leur acceptation.
Mais par sa maîtrise visuelle et son sens du rythme, Laguionie prouve, une fois de plus, qu'il est un des maîtres de l'animation actuellement.