Pentes glorieuses
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Le film s'ouvre sur des images d'archives représentant la face sombre de la libération, des femmes tondues, la honte sur les visages. C'est dans ce noir et blanc que la fiction commence, elle nous montre le ventre d'une femme enceinte, une croix gammée est peinte sur sa peau. Transition. Couleurs. Un petit garçon court sur la plage.
Cette introduction est d'une efficacité redoutable. Aucun mot n'a été prononcé, nous savons déjà tout ; à une heure où le cinéma français a une fâcheuse tendance à la bavardise, cet épurement fait du bien.
La suite raconte une relation qui rappelle la journée particulière d'Ettore Scola, deux êtres qui vont se retrouver par leur rapport à la marginalité. Il est homosexuel. Elle est une tondue. Les enjeux autour des deux personnages seront abordés avec la même intelligence que pour l'introduction et dénoués par une excellente idée : Jimmy.
D'abord, en tant que personnage noir, il est également marginalisé. Mais surtout, il est l'addition des attirances de François et de Madeleine, homme et soldat pour une armée étrangère, c'est une sorte de personnage-symbole qui aura pour fonction de faire éclater la vérité au sein du couple. La première relation sexuelle montrée entre les deux partenaires est un montage parallèle avec un bal masqué, c'est évidemment un symbole des masque sociaux que portent les deux protagonistes, et la scène permet de montrer un dernière fois Jimmy affublé d'un drap de fantôme. Durant cette scène, Madeleine et François acceptent d'être une façade l'un pour l'autre et conçoivent Jeanne qui sera leur future enfant, celui qui représentait le symbole de leur marginalité n'est plus qu'un spectre.
Depuis qu'il est enfant, Daniel veut savoir qui est son père biologique. La relation entre la mère et le fils est fascinante car il est pour elle le fruit d'une relation honteuse, Madeleine semble porter cet enfant comme s'il était une persistance de cette croix gammée qui lui a été peinte sur le ventre, c'est une relation mère-fils assez singulière au cinéma. Encore une fois la résolution de ce conflit est très efficacement mis en scène. Daniel, devenu adulte, rentre dans l'armée et se met à la recherche de son père ; dans le même temps Madeleine est atteinte d'un cancer et doit suivre une chimiothérapie, elle porte une perruque. A sa demande, elle écrit enfin une lettre qui reconnait officiellement la paternité de Daniel avec l'officier allemand, on la voit alors retirer sa perruque comme une forme de retour au point de départ, c'est encore une fois très ingénieux.
PS : Un point faible du film : Vincent Lacoste est toujours un mauvais comédien, le film pâtit de présence, mais on ne juge pas la qualité d'une œuvre au travail d'un seul comédien, donc bon.
Créée
le 7 juin 2024
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