Film du trajet, du chemin, de l'itinéraire, de l'espace et du temps parcourus, élevés comme symboles de la vie comme le démontrent ces images de fleuve qui court et ces citations poétiques, Le vent nous emportera, est une sorte de variation libre et ambulante autour des thèmes de la vie et la mort.
On y retrouve des questions récurrentes chez Kiarostami comme l'art (le photographe, l’œil du cinéaste en fait) ou la création (le bébé qui naît, le lait, un des leitmotiv), l'enfance et l'innocence, les femmes et leur beauté (ici pudiquement voilée), la vieillesse et la sagesse, entre autres.
Le tout dans un décor particulier qui revêt ici une importance notable, le village blanc avec ses portes si basses, ses maisons aux intimités vagues et mystérieuses, ses ruelles sinueuses pleines de recoins cachés et de points de vue insoupçonnés, si pittoresques et ses routes poussiéreuses entourées d'un paysage aride où sont dispersés des arbres surnaturellement imposants et majestueux.
Surplombant cet espace que l'on traverse à pied ou en voiture, où l'on s'arrête parfois pour parler à ses habitants qui se saluent tous, le regard presque ethnologique de Kiarostami qui veut rendre hommage à la culture humble et sage de son pays et aux mœurs de sa vie rurale. L'échange entre la femme qui sert le thé et son mari en est un exemple, et l'un des meilleurs moments du film. D'ailleurs, la parole se trouve au centre de ce film, comme souvent chez Kiarostami, qui a le don de nous prendre et nous emporter imperceptiblement par sa narration lente mais sûre parsemée d'anecdotes – ce qui n'est pas sans me rappeler cette petite conversation informelle mais si riche poétiquement à laquelle j'ai assisté et qu'il a livrée lors d'un festival de poésie dans l'Hérault quelques années avant sa mort.
Même si le scénario souffre de quelques faiblesses si bien qu'il laisse voir par moments qu'il ne sait pas vraiment où il veut nous mener, il nous reste un film plaisant d'un réalisateur au verbe élégant et au regard humain.
6.5 / 10