Le viol du vampire sorti en 1968 est le tout premier long métrage (en deux actes) de Jean Rollin. Tourné en noir et blanc avec très peu de moyens , ce premier film concentre déjà pour le meilleur mais aussi souvent pour le pire une grande partie de ce qui fera l’œuvre future de ce réalisateur si particulier.
Il n'est pas facile de résumer ce que raconte le film qui ressemble plus à un collage étrange de séquence qu'un récit clairement structuré. Il est question d'un châtelain retenant des femmes qui prétendent être des vampires alors que trois jeunes gens débarquent fermement décider à démontrer que tout ceci n'est qu'une mascarade...
Si Le viol du vampire possède un certain charme renforcé par un très beau noir et blanc, le film flirte aussi souvent vers la série Z et l'imbuvable film d'auteur. Toutes les obsessions et les univers gotiques et poétiques de Rollin sont déjà présents avec le vampirisme, l'érotisme, les crucifix , les cimetières, les châteaux, les cryptes et la plage. Déjà, et ce sera une des marques de fabrique du réalisateur les comédiens jouent assez faux et ils récitent leurs textes de façon mécanique entre déclamation théâtrale et inconstance vaporeuse. Les dialogues ne brillent pas particulièrement et semblent souvent bien creux et trop ampoulés . Mais Jean Rollin démontre déjà une belle faculté à créer une imagerie fantastique à la fois poétique et morbide. On retiendra de ce premier film quelques séquences étranges comme l'étonnante scène de l'enterrement avec son curé vampire trimbalant un crucifix à l'envers et terminant les bras en croix tiré par le corbillard dans une vision digne de Luis Bunuel. Quelques plans avec ce noir et blanc profond sont vraiment esthétiquement une réussite.
Mais ce premier essais est loin d'être pleinement convaincant à commencer par son montage en free-style rendant l'histoire aussi bordélique que souvent totalement incompréhensible. Le film est également assez lent et plutôt soporifique, autant dire qu'il faudra vraiment avoir une sérieuse envie et une belle motivation d'aller jusqu'au bout de l’aventure sans piquer du nez. Le film flirte carrément avec la série Z avec se bouts de décors qui se cassent la gueule à l'écran, ses faux raccords surréalistes ou encore ses figurants qui jouent les villageois avec des fausses moustaches de farces et attrape et une implication très relative. Parmi les autres réjouissance on trouve aussi une poursuite automobile avec des cascades réalisées avec des voitures presque à l'arrêt et un personnage sorte d'Igor grimaçant avec la bouche de travers et d'improbables sourcils qui prend un malin plaisir à se casser la gueule dès qu'il arrive au premier plan de l'image. On pourras également sourire devant cette grosse chauve souris réalisé avec des morceaux de draps et des bouts de ficelles digne d'un décor de spectacle de fin d'année d'école primaire en tout cas plus que d'un sabbat digne d'une reine des vampires.... Mais voilà, comme souvent ces défauts aussi grotesques soient ils participent totalement à la poésie du film.
Expérimental et fondateur de toute son œuvre futur, Le viol du vampire se doit d'être regardé comme une curiosité et surtout avec beaucoup, vraiment beaucoup d'indulgence.