Toute personne s'étant essayée à la critique le sait, il est infiniment plus difficile d'écrire sur un film que l'on a adoré que sur un film que l'on a détesté. Expliquer les défauts d'un film relève finalement de la simple observation, de l'évidence. Essayer en revanche de faire comprendre à un lecteur ce qui fascine, ce qui touche, ce qui émeut dans un film est bien plus difficile. Il devient, quand un film atteint un certain niveau d'appréciation, difficile de garder une distance, une objectivité qui pourrait mesurer le propos. L'émotion parle, et c'est bien elle que l'on cherche à transmettre, au point d'oublier les défauts éventuels. Mais cette émotion est difficile à transmettre par écrit.
Le Voyage de Chihiro fait pour moi partie de ces films. De ces films qui vous transcendent, qui vous touchent au plus profond, et qui vous rappellent pourquoi vous aimez le cinéma (d'animation ou non). C'est pourquoi il est compliqué d'en écrire une critique.
Alors plutôt qu'une critique, je donnerai ici un conseil : regardez le Voyage de Chihiro si ce n'est déjà fait.
Le Voyage de Chihiro raconte l'histoire de Chihiro, petite fille de 10 ans, embarquée dans un monde peuplé d'esprits. Déprimée par un déménagement, inquiète après que ses parents furent transformés en cochons, égarée au milieu d'esprits, Chihiro nous donne un bel exemple. Elle affronte ses peurs, ses doutes, et tous ses problèmes en pensant à ses proches. Que ce soit pour ses parents, pour Lin, pour le vieux Kamaji ou pour Haku, l'attitude de petite fille exaspérante du début de film laisse place à une détermination motivée par l'altruisme.
Critique de l'industrialisation par l'établissement des bains, et plus globalement du monde du travail, Miyazaki nous plonge dans son récit le plus féérique, le plus enchanteur. Délaissant la brutalité et la puissance de Princesse Mononoké, Miyazaki dépeint un monde d'esprits, aérien, peuplé d'esprits aussi divers qu'intéressants (sans-visage, esprit de la rivière...).
Proche d'un rêve, sans réelle notion temporelle, son récit nous plonge aux côtés d'une fillette isolée, perdue, se mettant au service de la sorcière Yubaba.
La beauté du trait, la fluidité de l'animation, la richesse du scénario... Tout cela est en plus sublimé par une magnifique bande originale, signée comme toujours pour les films de Miyazaki par Joe Hisaishi. D'"Inochi no namae" en ouverture à "Reprise", elle rythme parfaitement ce chef d'oeuvre.
Monument de l'animation, Le Voyage de Chihiro est touchant à presque chaque instant. Même en montrant simplement une petite fille prendre le train.
Les ombres défilent, les esprits passent, une empreinte reste. Gravée dans nos mémoires, elle est inoubliable.