Un personnage fascinant

Ce portrait de Lee Miller (50 mn) est sorti sur ARTE en 2020, donc bien avant le film de Ellen Kuras avec Kate Winslet dans le rôle principal et qui ne met en avant presque uniquement que la photographe de guerre. C’est très réducteur quand on regarde ce documentaire où Miller nous apparaît comme une femme fascinante, comme si elle possédait plusieurs personnalités, parfois contradictoires, en une seule personne. Les intervenants sont plus ou moins intéressants (les propos des mannequins actuels n’apportent pas grand-chose). Le plus marquant est son fils, Anthony Penrose qui raconte que jusqu’à la mort de sa mère, il a ignoré toute son activité de photographe. Il évoque une mère qui n’en était pas vraiment une, et qu’il n’a connu qu’alcoolique, dépressive et colérique, pour qui prendre un simple train devenait un parcours du combattant. C’est à sa mort en 1977 qu’il a découvert des cartons remplis de photos dans le grenier, il savait qu’elle avait été mannequin dans les années 20 mais n’en avait jamais vu de photos et il ignorait l’étendue de son travail de photo-reportrice à la fin de la 2nde guerre (dont la fameuse photo prise dans la baignoire d’Hitler à Munich alors qu’elle venait de découvrir le camp de Dachau). Et puis, dans les années 30, alors qu’elle était pendant 3 ans la compagne de Man Ray, elle a réalisé des photos proches du surréalisme absolument sublimes, amie de Picasso, Breton et tous les grands artistes qu’elle a côtoyés à Paris. Miller était avant tout une artiste mais elle a vécu mille vies en une et a fini, brisée après la guerre, recluse dans une maison de campagne isolée en Angleterre, devenant mère sans le vouloir et cachant dans des cartons les différentes existences qu’elle a pu mener, n'en parlant pas à son fils. Bien plus intéressant que le biopic à mon goût même si le mystère autour d’elle est loin d’être levé.