Lorsque je suis tombé il y a plus de 20 ans sur Legend of the Sacred Stone, je suis resté bouche bée au sortir du visionnage. Malgré une qualité d’image discutable, malgré un doublage japonais un peu aléatoire, je suis resté sur le cul. Qu’est-ce que c’était que ce truc frénétique avec des marionnettes que je venais de voir !?! C’était juste fou. Depuis, j’attendais désespérément de pouvoir le revoir dans des conditions décentes et c’est désormais chose faite grâce à Spectrum Films et leur coffret consacré au studio Pili. J’avoue qu’un film avec des marionnettes, ça peut faire peur, même au plus aguerri des cinéphiles, et même certains des plus gros amateurs de wu xia pian made in Hong Kong n’ont jamais voulu s’aventurer dans le visionnage. Pourtant, il ne faut pas avoir peur car vous allez vivre une expérience absolument unique. Et si vous adhérez, lancez-vous dans le plus récent Demigod, présent dans le même coffret. Ou encore The Arti : The Adventure Begins dont je vous parlais il y a deux ans. Oui, découvrez les films du Studio Pili, il le faut !


Le Budaixi, théâtre de marionnettes traditionnel de Taïwan, est un art ancestral qui respecte certains codes que je n’exposerais pas ici. Je préfère vous renvoyer à l’excellent dossier que Paul Gaussem a consacré au Studio Pili et que vous trouverez ICI et qui, entre autres, explique comment une famille a modernisé cet art pour en faire ce qu’il est aujourd’hui. Legend of the Sacred Stone est le premier film produit par le Studio Pili et les moyens ont été mis pour en faire un énorme blockbuster, entre autres dans l’optique de conquérir le marché chinois et international. C’est pas moins de 300 millions de dollars taïwanais qui ont été mis sur la table, soit environ 9.5M$ US, pour ce spin-off de la série phare du studio. Cela peut aujourd’hui sembler peu mais pour l’époque à Taïwan et, qui plus est, pour un film de marionnettes, c’est juste faramineux. Du coup, tout a ici été vu en grand, des marionnettes superbes aux décors faramineux en passant par des CGI omniprésents et des combats simplement fous. Commençons par ce qui est peut-être l’unique point noir de Legend of the Sacred Stone. On le comprend très rapidement avec la narration contextuelle en début de métrage, puis sous forme de voix off, il y a tout un background derrière ce film, tout un historique, avec des personnages qui existent déjà. Comme nous sommes ici dans un spin-off d’une série Pili, et qu’il semble y avoir pas mal de références à ladite série tout au long du film, certains passages peuvent paraitre un peu confus. Pour l’habitué des Shaw Brothers des années 70 et des moult intrigues et autres prolifération des personnages, il y a moyen de raccrocher les wagons, mais le néophyte risque d’être rapidement un peu perdu bien que, en soi, le scénario de Legend of the Sacred Stone ne soit pas si compliqué que ça. Mais qu’on comprenne réellement les tenants et les aboutissants de l’histoire ou non, qu’importe au final tant le spectacle proposé est un pur régal pour les yeux.


Dès la première scène d’action qui intervient après la narration initiale, Legend of Sacred Stone flatte la rétine par son incontestable beauté picturale. Déjà, les marionnettes sont superbes, finement ciselées et très travaillées. Très différentes les unes des autres, prenant des postures élégantes avec des costumes magnifiques, elles semblent tout simplement vivantes tant le travail des marionnettistes est assez exceptionnel. Là où Legend of the Sacred Stone étonne également, c’est par son ton très adulte, aussi bien par son contexte relativement sombre (avec par exemple son lot de trahisons), mais également le côté assez sanguinolent des combats à base de gerbes de sang et de marionnettes découpées, semblant faire référence au cinéma de Chang Cheh. Ce ne sont que des marionnettes et elles sont très peu animées au niveau du visage mais pourtant, le travail est tel qu’on arrive à ressentir leur souffrance. Et puis il y a les scènes d’action, l’attraction principale de Legend of the Sacred Stone tant ce qui défile sous nos yeux est tout simplement fou. Nous sommes ici dans quelque chose à mi-chemin entre les wu xia pian psychotroniques de la Shaw Brothers du début des années 80 et les neo wu xia pian frénétiques de Hong Kong de la première moitié des années 90, le tout à la sauce CGI qui, avec l’énorme succès de Stormriders de Andrew Lau, étaient à la mode dans toute l’Asie. C’est survitaminé, ça virevolte dans tous les sens, ça explose le moindre bout de décor dès que ça en a l’occasion, le tout avec une mise en scène millimétrée, extrêmement intelligente, aux cadrages dignes des meilleurs films du genre. Tout y est extrêmement cinétique, des plans serrés sur des jambes qui esquivent à la poussière qui se soulève après des pas en passant par le visuel des épées qui vibrent sous les coups, le tout dans une folie visuelle sans limite grâce aux CGI. Certes, les effets spéciaux ont vieilli, sont parfois un peu cheap, et sont très ancrés dans leur époque, mais ils accentuent le charme du spectacle proposé et permettent d’augmenter encore plus la folie et le côté pulp de ces scènes d’action, nous faisant presque parfois oublier que nous sommes dans un film de marionnettes.


OVNI à sa sortie dans le paysage cinématographique asiatique, sans doute le meilleur film du Studio Pili, Legend of the Sacred Stone est un petit bijou et un pur bonheur pour les yeux. Oui, c’est des marionnettes, et alors ?


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-legend-of-the-sacred-stone-de-chris-huang-2000/

cherycok
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Créée

le 24 nov. 2011

Modifiée

le 22 août 2024

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