Peut être le reflet d'interrogations sociales suite à l'abolition de la peine de mort en 1981, le cinéma français va connaître une petite vague de vigilante movie au début des années 80 avec notamment Tir Groupée de Jean Claude Missiaen ou Liste Noire de Alain Bonnot. Légitime Violence est un film qui s'inscrit lui aussi dans cette même veine avec à la mise en scène Serge Leroy, un réalisateur dont j'apprécie particulièrement certains films comme Attention Les enfants Regardent et surtout l'excellent La Traque (1975). Un vigilante movie politique globalement proche dans l'esprit du cinéma d'Yves Boisset mais un film qui au final peine à totalement convaincre.
Légitime violence nous raconte le calvaire de Martin Modot (Claude Brasseur) un brave type dont la mère, la femme et la fille sont tuées par des malfaiteurs lors du casse d'un bureau de changes qui dissimule en fait un attentat politique. Face à une police bien plus focalisée sur la mort de ce politicien que sur celle d'une partie de sa famille et titillé par une association d'auto-défense prônant le retour de la peine de mort, l'homme désespéré se laisse bercer par les sirènes de la vengeance et de l'auto justice et il entreprend sa propre enquête afin de retrouver les meurtriers.
La principale force du film de Serge Leroy est sans doute de proposer un récit assez sobre et nuancé sur les notions d'autodéfense et de justice expéditive. Nous ne sommes clairement pas dans une mécanique type un justicier dans la ville avec d'affreux criminels, une justice défaillante et un type dont la tristesse s'est muée en haine et en violence. Dans Légitime Violence on se retrouve avec un type plutôt paumé, tiraillé entre l'envie qu'on lui foute la paix et le désir de justice, du coup le côté vigilante se retrouve presque entièrement incarné par cette association nostalgique du couic-couic de la guillotine, la CAPMAC (Comité contre l'Abolition de la Peine de Mort et pour l'Autodéfense des Citoyens). C'est avec l'empressement d'un vautour fondant sur un cadavre encore tiède que cette association va alpaguer Martin Modot pour lui imposer dans l'esprit l'idée insidieuse qu'il doit agir pour la justice et la mémoire de ses proches. On trouve donc dans Légitime Violence (qui porte bien son titre) tout un questionnement sur la légitimé et la source de la violence, celle de l’état comme celle des citoyens car derrière ce fait divers se cache un attentat politique commandité comme il se doit par quelques personnes en responsabilité qui se sont servis d’exécutants comme de simples pions. On est donc loin du récit un peu bas du front du type qui dézingue à tout va pour apaiser sa colère et globalement le personnage interprété par Claude Brasseur ne fait qu'essayer de mener l'enquête et confondre les coupables.
Malheureusement à force de nuances et de circonvolutions Légitime Violence perd en force et en impact d'autant plus que les personnages peu crédibles restent pour moi le plus gros point faible du film. Dans le rôle de Martin Modot, Claude Brasseur traverse tout le film avec une sorte de nonchalance apathique du mec qui semble un peu s'en foutre de tout, ce qui ne sied pas vraiment à l'adhésion à ses peines et sa colère profonde. Thierry Lhermitte peine vraiment à pleinement convaincre en petit chef de bande et tenancier de boîte gay et il frôle même parfois la sortie de route et le ridicule comme lorsqu'il demande avec la moue boudeuse si sa sœur est bonne parce que lui ne le saura jamais. La sœur en question est interprétée sans grande conviction par Véronique Genest, mais bon je reconnais que je n'ai jamais apprécié cette comédienne. Ceux qui s'en sorte le mieux sont encore les seconds rôles avec Christophe Lambert dans le rôle d' une petite frappe attendrissante surnommé Jockey à cause de ses bottes, Michel Aumont en chef de la police aux troubles manigances, Roger Planchon en président et chef de meute manipulateur de la CAPMAC et Christian Bouillette en brave et bon flic.
Au Final ces personnages en demi teinte, cette intrigue qui manque de puissance et d'impact et qui peine à faire profondément ressentir les émotions donne la sensation que Légitime Violence est un thriller assez mou, tiède et dispensable.