De deux choses l'une : soit vous êtes un peu déprimé en ce moment et il vaut mieux vous tenir à distance de ce documentaire magnifique et insoutenable, soit vous êtes excessivement déprimé en ce moment et suivre l'histoire tragique de cette jeune femme en bref sursis vous aidera peut-être à retrouver le chemin de la survie. Dans tous les cas, vous allez en baver... Et pourtant, c'est beau à pleurer. Ses photos, ses yeux, ce qu'elle raconte, tout suinte le désespoir le plus lumineux, et c'est tout le paradoxe et l'intérêt de ce film : une angoisse sans remède dans le même temps qu'une ode à la beauté, ou du moins à une certaine forme de beauté. Dans le même temps, c'est l'enfer, on a l'estomac retourné du début à la fin; trop d'émotion, c'est intenable. Mais je n'ai pas lâché, en dépit de tout. Il fallait que j'accompagne cette pauvre enfant jusqu'à la tombe, allez savoir pourquoi, et j'ai idée que je n'ai pas été la seule. Il faut voir les choses en face : la vie est insupportable à certains, c'est ainsi. Parfois, c'est inguérissable. Lene Marie, la photographe surdouée norvégienne, comparait son calvaire à un régime nazi à l'intérieur d'elle-même. On ne peut que lui donner raison, ça se voit. Comme ses parents l'ont fait, il faut bien que le spectateur se résolve à la laisser se détruire. Autant vous dire que ça coûte un peu.