Fin des années 80, Philippe de Broca essuie un cuisant échec avec Chouans!, son épopée française sur la guerre qui opposa les Républicains et les Royalistes, qui ne convainquit personne en salles mais attira plus de monde à la télévision pour sa version longue répartie en quatre téléfilms. Il décide pour la quasi-totalité de la décennie suivante de rester à la télévision et en profite pour mettre en scène une très libre adaptation du conte des Mille et Une Nuits pour France 2 à travers un téléfilm de 3h découpé en deux parties. À l'inverse de Chouans!, le produit sortira en salles quelques mois plus tard dans une version forcément découpée de moitié, enlevant notamment toute l'intrigue où Aladdin devient émir dans le désert et de nombreuses séquences concernant les sentiments des protagonistes envers Shéhérazade.
Pour une production télévisuelle d'une telle ampleur, le réalisateur de L'Homme de Rio avait la promesse d'un budget conséquent mais va vite déchanter lorsqu'il découvrira que les francs promis réduisent au fur et à mesure, l'empêchant d'obtenir pleinement satisfaction. Partiellement tourné en anglais avec une pléthore d'acteurs français (Gérard Jugnot, Stéphane Freiss, Thierry Lhermitte, Roger Carel...) mais aussi la légende italienne Vittorio Gassman et les tout débuts d'une Catherine Zeta-Jones de 19 ans, Les 1001 Nuits fit un bide retentissant. Pourtant, les décors naturels du Maroc, les excellents effets spéciaux originaux (n'en déplaise...) et l'humour cocasse à base d'anachronismes offraient un spectacle un peu longuet mais réjouissant.
Pour l'histoire (en version intégrale), nous suivons donc les aventures de Shéhérazade, jeune esclave pleine de fougue qui s'avère être au cœur de toutes les convoitises sexuelles des gens qui l'entourent. Tentant sans cesse de vivre une vie libre et être aimée sans pensées libidineuses, elle rencontrera un roi monogame qui ne rêve que d'être acrobate, un clochard nommé Aladdin dont le pouvoir monte vite à la tête, le marin Sinbad qui ne sait pas nager et surtout un génie atypique sortant d'une lampe magique, un génie qui n'est autre qu'un ancien astronome emprisonné au XXe siècle. Cette reformulation tout en décalages divers et variés peut ne pas plaire à tout le monde, Philippe de Broca s'amusant à briser tous les codes pour offrir une aventure pleine de rebondissements (peut-être un peu trop).
Dommage en revanche que la mise en scène soit parfois trop plate, contrastant avec des séquences dingues (la course-poursuite en moto invisible ou l'échappée en avion) et des répliques le plus souvent trop sérieuses pour le ton loué au film, mélange de comédie d'aventures et de fantastique qui ne tombe jamais dans la parodie. On ne rit pas aux éclats, on ne s'avère que trop rarement époustouflé et la magie n'opère quasiment jamais, de Broca peinant à retrouver son talent d'autrefois pour en mettre plein la vue au spectateur. Reste du film une curiosité unique et décalée, au rythme en dents de scie et à l'histoire un brin étirée mais également une sacrée audace dans le cinéma français.
A noter que même la version DVD sortie en 2004 ne propose pas cette version intégrale, devenue une perle de rare pour les amateurs.