Cluedo dans la cabane.

Tarantino revient en 2016 avec son projet le plus maudit qu'il est eu. Une première version de scripte mise en ligne par des hackers puis plus tard, le film en entier. Le bougre était à deux doigts de lâcher la main, de renoncer totalement à ce projet en le mettant plutôt en scène en pièce de théâtre. Heureusement pour nous, il s'est repris et a livré encore un excellent film, complétant sa carrière déjà remplie par de nombreux films cultes, qui ont chacun marqué la pop culture. Inspirations, références, ces mots-là sont toujours employés par les admirateurs ou les détracteurs de Tarantino. En effet ce dernier a toujours pris soin de rendre hommage aux films qui ont créé sa cinéphilie que ce soit dans la réalisation de ses longs métrages où de ses histoires et personnages. « Les 8 Salopards » n’échappe pas à la règle mais il proposera quelque chose de bien différent.

Si vous vous attendez à un western à la Sergio Leone où quelque chose qui se rapproche de la « Horde Sauvage », laissez tomber vos attentes tout de suite. Le film sera pratiquement un huis clos de 3 heures où les protagonistes entre-tueront joyeusement. Alors attention l’intégralité du film ne se déroulera pas dans la fameuse mercerie, il faudra compter deux chapitres entiers au développement des personnages principaux dans une diligence se dirigeant vers la ville de Red Rock. Cette introduction servira notamment à brouiller les pistes sur ces personnages. Les vraies révélations et leur véritable identité se dévoilera après lors de scènes bien mémorables. En particulier pour Samuel L. Jackson (pour ceux qui ont vu le film vous comprendrez ce que je veux dire, il y a une scène quand même qui va loin, hem…).

Le film prend son temps, mais ça ne veut pas dire qu’il est lent, Tarantino métrise toujours aussi bien sa plume pour ce qui est de rédiger des dialogues percutants avec des répliques qui font mouches. Il est l’un des rares à savoir instaurer un rythme très précis dans ses dialogues (ils constituent 90% du film à savoir) pour ensuite y insérer une tension très progressive entre les personnages qui finit par déboucher sur une explosion de violence. Celle-ci est bien brutale mais comme toujours assez grotesque, comme dans la plupart des Tarantino. L’abus de gore est voulu et participe à l’atmosphère du film. Oui car vous serez peut être étonnés de constater que Tarantino vient de réaliser peut être son premier film d’horreur. L’Atmosphère est horrifique et oppressante avec une composition de d’Enio Morricone très inquiétante et très proche de celle qu’il avait composé pour « The Thing » (1982). D’ailleurs nous retrouvons un peu cette atmosphère de ce film dans « Les 8 Salopards » avec ces étendues enneigées et ce blizzard piégeant les protagonistes du film dans la mercerie les vouant à une fin certaine de leur existence. La réussite du film vient aussi des performances de tous les acteurs du film. Tous sont excellents et rendent crédible cette confrontation de 8 salopards, mention spéciale à Samuel L. Jackson et Kurt Russel.

Si l’on retrouve l’humour et les situations cocasses de Tarantino, le ton est au final assez pessimiste sur la nature humaine, et désespéré de l’état de notre monde. Le film se déroulant quelques années après la Guerre de Sécession, on peut voir encore les ravages que cette guerre a provoqué. Le film a ainsi un contexte politique très appuyé qui participe au ton du film. Ce huis clos permet peut-être de créer une métaphore du monde actuel. La dernière scène du film, présage un avenir incertain à notre monde déchiré et pleines de blessures qui se rouvrent pour saigner encore plus abondamment.