J'étais, avouons-le, peu tenté par le kitsch du dernier Rohmer - pendant longtemps mon réalisateur préféré -, et la première partie de cette adaptation précieuse (le ton Rohmerien, à la fois charmeur et irritant, éclate dès les premiers dialogues !) de "l'Astrée" d'Honoré d'Urfé a confirmé mes craintes : n'y décèle-t-on pas finalement chez Rohmer les premiers signes de la sénilité, et son choix - intellectuellement indiscutable - de l'adaptation au pied de la lettre de mignardises du XVIIe siècle ne condamne-t-il pas "les Amours d'Astrée et de Céladon" au ridicule ? Il faut patienter tant bien que mal une bonne heure pour que les mécanismes pervers de la fiction Rohmerienne se mettent en place : dès lors que la machination du vieux druide conduit le héros au travestissement, pour mettre à l'épreuve l'obstination butée des deux amoureux, le film devient brûlant, conjuguant une sensualité inédite chez Rohmer avec son habituel génie dans la chronique pantelante de l'amour. 30 minutes de pur génie. [Critique écrite en 2008]