Je n’ai jamais été un potterhead. Contrairement à beaucoup de ma génération, je n’ai pas ressenti d’émoi face aux aventures du sorcier binoclard. Alors certes, j’aime bien les films, j’aime vraiment beaucoup les bouquins, mais j’ai toujours trouvé que cette saga manquait d'un je n’sais quoi qui m’aurait impliqué davantage. Pour moi, Harry Potter, ça a toujours été un univers avec un très bon potentiel, mais limité par son histoire et un lieu, l’école de Poudlard. En soi, le récit de Harry Potter est franchement cool, et J.K Rowling a réussi à nous conter une histoire prenante et surtout cohérente (du moins concernant les livres). Mais voilà, Harry Potter, ça ne se passe quasiment qu’à Poudlard, donc difficile de développer un univers aussi prometteur soit-il.
Pour pallier ce souci et contenter les fans avides d’en savoir plus sur ce Wizarding World, Warner a décidé d’entamer une nouvelle saga, Les Animaux Fantastiques. Le premier était correct, le deuxième effroyable et ce troisième volet…nul. Pourtant, tout est là pour que ça marche, l’univers est enrichi, y a plein de nouveaux personnages sympathiques, la réalisation de David Yates est efficace bien que sans grande inspiration. En réalité, cette saga ne souffre que d’un seul problème et dieu sait qu’il est de taille…J.K Rowling.
Et oui, parce qu’aussi bonne auteure de roman soit-elle, il y a raconter une histoire sur papier et raconter une histoire sur pellicule. Et cette différence, notre chère Rowling ne la comprend pas. Elle s’obstine à appliquer ses mécaniques d’écritures. Certes, ça fonctionnait dans les livres Harry Potter puis dans les films parce qu’il y avait un travail d’adaptation derrière. Mais dans Les Animaux Fantastiques, ça ne marche pas. Alors, p’tet qu’en roman, Les Animaux Fantastiques aurait pu être une très belle œuvre, riche et pleine de rebondissements, mais en film…ça ne passe absolument pas.
Parce que Rowling, elle est gourmande en intrigue, en fusils de Tchékov, en McGuffin, en retournement de situations. Ça passe dans un bouquin parce que c’est long et donc nécessaire. Mais ça ne passe assurément pas dans Les Secrets de Dumbledore, il y a trop de trucs, et pas assez de trucs en même temps. Trop de trucs qui ne servent à rien, qui rallongent le temps du film et qui te font regarder ta montre ; et pas assez de trucs qui donneraient assez de consistance au récit pour qu’on en ait quelque chose à foutre. Il y a quand même une intrigue complète sur un sorcier infiltré chez l’ennemi qui n’aboutit à rien d’autre qu’un sauvetage éclair de deux personnages secondaires. Il y a quand même une heure de péripéties abracadabrantes pour que les personnages se retrouvent tous à Poudlard et que l’un d’eux clame « mais dis donc, on est revenu à notre point de départ » pour que Dumbledore réponde « ouiiii…mais pas tout à fait, vous comprenez, les fans…ils sont contents, on est à Poudlard et tooout ». Oui, moi, tout ce que je vois, c’est que Rowling n’a absolument aucune idée d’où elle va avec son histoire. Ce qui est terrible, c’est qu’à la fin de ce troisième volet, la situation est la même qu’au début du deuxième. Alors certes, des personnages sont passés d’un camp à l’autre, Grinderwald a changé un peu de statut auprès du peuple magiciens, mais au final, le plateau d’échec est resté à la même position, à savoir au point de départ. Et ce au prix de quoi ? Au prix de nombreuses sous-intrigues à coup de sauvetage du frangin dans un grotte dont on ne sait absolument pas ce qu’il fout là, ou d’une tentative d’assassinat sur Grinderwald qui n’aboutit à rien.
C’est ça que je reproche à Rowling, c’est qu’elle a l’impression de t’offrir un récit ultra dense avec des machinations politiques et des retournements de situations de folies alors qu’il n’en est rien du tout. Mais merde quoi, ça fait trois films qu’elle pousse l’allégorie de la montée de l’extrémisme nazi avec Grinderwald et ses complots politiques, qu’elle change de registre, ou au moins d’angle d’attaque parce que là, ce n’est plus de la redite à ce stade, c’est du radotage. Surtout que ce film, bon sang qu’il est bavard. Ça ne cesse de parler, d’expliquer encore et encore qui est qui, pourquoi on fait ça. Et pourtant, Rowling arrive encore à laisser plein de trous dans son scénario. Au nom de quoi Jacob se retrouve au même banquet que Grinderwald alors que c’est un moldu ? Pourquoi on nous sort un talisman qui empêche Dumbledore d’affronter Grinderwald et qu’à la fin, ils finissent par se battre sans qu’on nous propose d’explication valable par la suite (« mmmh, il voulait tuer et moi protéger, ça a changé le destin, c'est sans doute ça » mais ta gueule). Et même la grosse révélation de fin du deuxième film avec les liens de sang entre Croyance et Dumbleodre, elle ne s'en sert pas pour créer une tension ou quoique ce soit... elle ne s'en sert pas ! Tous les retournements de situations sortent d’un chapeau magique à coup « deus ex machinacadabra », des facilités d’écriture grosses comme mon poing qui me font juste dire « cette dame ne sait pas écrire de scénario ».
Et au final, ça me fait poser la question : Harry Potter était-ce la seule bonne idée de J.K Rowling ? Est-ce que c’était juste un coup de génie passager et depuis la fin des aventures de notre héros, elle patine dans un univers dont elle ne sait absolument pas quoi foutre ? Parce que les gens autours d’elle, ils sont plein de bonnes volontés : les acteurs font le taff, Yates assure à la réalisation, les musiques sont sympas, c’est juste qu’elle ne sait absolument pas quoi faire, quoi raconter, quoi créer. On nous sort le « chef suprême du monde de la magie » comme si ça avait toujours existé mais non ma chère dame. Ça va de contradictions en contradictions au point de fragiliser un univers qui était pourtant plein de belles promesses. Donc ouais, moi je le pense…J.K. Rowling a eu une bonne idée, ça s’appelait Harry Potter et depuis que c’est terminé, elle est en panne d’inspiration. Elle refait la même potion magique en changeant un peu les épices sans se poser de question, mais pourquoi s’en poserait-elle ? Les potterheads seront toujours au rendez-vous et prêts à applaudir tant qu’ils ont un peu l’impression de retrouver cet univers qui les enchante, même si la potion est avariée depuis des lustres. Mais désolé, moi, cet univers, je le trouve creux, et ce n’est pas Rowling qui va l’enrichir. Et ce n’est certainement pas deux films de plus avec ces Animaux Fantastiques qui me feront dire le contraire.