Les secrets d'un échec (spoilers)

Après un premier volet particulièrement ennuyeux en 2016, un second volet beaucoup plus dark et plus réussi et néanmoins boudé par la critique en 2018, les animaux fantastiques 3- les secrets de Dumbledore, semble conclure de manière précipitée une saga maudite, où rien ne s’est déroulé comme prévu.

Le tournage du troisième opus a été perturbé par la crise sanitaire, par l’affaire Johnny Depp et Amber Heard où l’acteur qui incarnait le grand méchant Gellert Grindelwald a été obligé de céder le rôle à Mads Mikkelsen alors que 50 % du film avait déjà été tourné, Ezra Miller qui connaît des déboires judiciaires et la polémique JK Rowling qui s’est mise une partie de sa fan base à dos pour certains propos tenus.

Toujours est-il que l’univers d’Harry Potter semble de plus en plus échapper à sa créatrice originale, parce que elle n’a en soit plus rien à raconter et qu’elle cabotine dans ce troisième opus au tel point qu’on lui a adjoint un co-scénariste pour l’aider ( ce qui ne sauve pas le film), et paradoxalement, l’univers d’Harry Potter semble de plus en plus être repris par une partie de ses fans voir de ses acteurs, qui rejettent en bloc JK Rowling et décident de s’approprier l’univers et d’en faire ce qu’ils veulent, peut être au point, qui n’est pas confirmé et donc hypothétique, que l’actrice qui incarne Tina Goldstein, Katherine Waterston qui était l’un des personnages secondaires des deux premiers opus, le love interest du main character Norbert Dragonneau, est absente de la promotion de ce cet opus, et n’apparait que à peine 2 minutes dans le film, en caméo, comme si désormais, l’actrice voulait limiter au maximum son apparition dans l’univers Wizarding World.

Et tu vois que les scénaristes semblent suivre puisque certains personnages qui faisaient des caméos dans le second opus, comme l’assistante Bunty ou encore le professeur Lally Hicks, se voient projetés d’un coup comme étant respectivement les futurs love interest des frères Dragonneau. Mais plus que ces chamboulement scénaristiques et je dirais même, artistiques, ce qui est affligeant dans ce film, c’est qu’au fond, il est mauvais.

Je ne comprends pas comment on peut cracher sur les deux précédents opus et trouver celui-ci mieux que le précédent. Tout les enjeux se terminent avec cet opus, puisque Warner Bros ne sait pas encore s’il va faire un opus 4 et 5, donc il faut conclure avec ce volet au cas où. Et c’est mal fait. Finalement les personnages mis en valeur dans les précédents opus, sont délaissés, Norbert a juste la fonction de « héros » basique, on ne va plus essayer d’approfondir sa psychologie ou sa relation avec Tina puisqu’elle n’est pas dans le film, les autres personnages sont utilisés à outrance, Jacob qui était moins utilisé comme ressort comique dans les précédents opus est ici le fer de lance du film avec des blagues moisies et du romantisme à deux balles dans sa relation avec Queenie.

Réellement ce film ne fait à aucun moment sens, ou très peu pour être objectif. Y a deux ou trois scènes que j’ai bien aimé, la scène au début entre Queenie et Croyance j’ai trouvé ça bien, les scènes avec Gellert Grindelwald même si il n’est pas à la hauteur d’un Voldemort comme antagoniste et c’est tout.

Même le sous titre du film, les secrets de Dumbledore, est complètement foiré. Vous allez apprendre la filiation exacte de Croyance avec les Dumbledore dans ce film et que Dumbledore a un pacte de sang avec Grindelwald et qu’ils étaient amants plus jeunes. Sauf que les fans le savaient déjà en fait, donc rien de nouveau sous le soleil.

Les enjeux sont donc expédiés, la bataille Croyance vs Dumbledore est nulle, y a aucun moment où réellement j’ai eu peur pour les personnages, parce que Grindelwald est un antagoniste en carton. Dans le second opus, la scène du début où Grindelwald fait assassiner un couple pour prendre leur appartement, et qu’il se rend compte qu’il reste un enfant moldu dans une chambre, et que sans un mot il le regarde puis laisse sa complice le tuer, au moins y avait une tentative de montrer que c’était un méchant ( certes un peu plus nuancé que Voldemort) . Grindelwald tuait des gens dans le second opus, il y avait une montée en puissance. Après ce troisième opus, véritablement, qui a encore peur de Grindelwald ? Il ne tue personne dans le film, à part un animal pseudo sacré du monde des sorciers, afin de manipuler une sorte d’élection pour être élu président du monde des sorciers et déclarer la guerre aux moldus.

Et d’ailleurs on voit que le film avait une vocation politique, sauf qu’il se prend les pieds dans le tapis en tombant dans un manichéisme des plus sommaires. Nous sommes dans les années 30, le monde est troublé dit Dumbledore, ok, donc donne nous du contexte ? Y en a pas. Y a des élections et un candidat avec des idées dangereuses Grindelwald rôde dans l’ombre. Et dumbledore dit « faut choisir le bien plutôt que la facilité ». Et c’est tout. A aucun moment on explique que peut-être dans le monde des sorciers y a une crise économique qui fait que Grindelwald monte dans les sondages, à aucun moment on explique qu’il y a eu par exemple des attaques de moldus sur des sorciers qui pourraient expliquer la montée d’un mouvement anti-moldus mené par Grindelwald. En fait à aucun moment du contexte est donné pour expliquer comment Grindelwald, qui est un terroriste en cavale, d’un coup est absout des ses crimes du précédents opus pour participer à la dernière minute à une élection soit disant démocratique mais qui au final va se régler par un deus ex machina.

Ce deus ex machina, c’est une créature fantastique, le Quiling, une sorte de biche qui s’incline devant la personne la plus honnête et gentille du monde, qui ferait donc que la personne serait élue président ou présidente. Et donc le plan de Grindelwald, c’est de tuer un Quiling pour le ressusciter pour qu’il s’incline devant les gens « méchants » ou « obscurs » et ainsi truquer les élections et gagner et déclarer la guerre aux humains.

Et donc une équipe de bras cassés va tenter de déjouer la prise de pouvoir de Gellert, qui d’ailleurs tente de faire assassiner une candidate rivale sauf que j’ai pas compris pourquoi il aurait besoin de le faire, puisqu’il truque le jeu ? Et donc on a tout un climax nul où Jacob est faussement pris pour un assassin, donc il passe dans le journal des sorciers comme étant un humain ayant « tenté » de tuer Grindelwald et déjeune au calme dans les couloirs de Poudlard avec des étudiants 5 min plus tard.

Le film n’a aucun sens. Au mieux il est très maladroit, au pire, il est mal écrit, mal développé, manichéen à l’extrême ce qui dessert complètement le film puisque à aucun moment on essaie d’expliquer pourquoi Grindelwald fait ce qu’il fait, et pourquoi Dumbledore doit éviter le conflit entre sorciers et moldus. On est juste sur du basique, c’est à dire Dumbledore incarne le bien et Grindelwald incarne le mal, sauf qu’ils ont été amants dans leur jeunesse, ils avaient un projet politique pour le monde des humains et ça aurait été intéressant de nuancer cela et de voir en quoi ils étaient d’accord, en quoi ils étaient en désaccord...

A la fin du film, la biche s’incarne devant Dumbledore, et Dumbledore parle à la biche en mode «  non mais moi je veux pas être dirigeant, par contre va t’incliner devant cette candidate elle est gentille » et de ce fait, Dumbledore choisit entre guillemets, choisit la présidente de la confédération des sorciers. A aucun instant de ce film n’est abordé le programme politique des deux autres candidats que Grindelwald, même Grindelwald ne fait pas de discours politique, de campagne. C’est nul. Dans ce film j’ai eu l’impression qu’ils réduisaient la politique à un truc bim bam boum c’est magique.

Cela aurait été tellement plus intéressant de voir Grindelwald essayer de gagner les élections légalement, en faisant des discours politiques , et peut-être en manœuvrant dans l’ombre avec sa clique de partisans pour déclencher des incidents avec les humains qui justifieraient du point de vue d’une partie de l’opinion publique des sorciers qu’il soit élu candidat. Et puis à la fin, il serait élu et il déclenche la guerre et à suivre pour le quatrième opus. Rien de tout cela.

Grindelwald est donc battu par un stratagème basique et Dumbledore et lui se batte après que le pacte de sang ait été rompu ( là aussi c’est expédié et ça ne fait pas sens, le pacte se rompt parce que Grindelwald tente de tuer Croyance et que Albus le protège), et puis d’un coup ils s’arrêtent, se mettent la main sur le coeur, on sent qu’il y a encore des sentiments entre les deux, Grindelwald tente d’utiliser une dernière fois l’amour que lui porte Dumbledore pour le manipuler, il refuse, il s’enfuit et désormais le seul enjeu dans cet univers, puisque Grindelwald est défait et qu’il est au fond inoffensif car il a eu des centaines d’occasion de tuer ces adversaires dans ce film et ne le fait jamais, le seul enjeu c’est de le retrouver et de le mettre en prison pour être raccord avec les reliques de la mort.

C’est tout. Queenie et Jacob se marient, après un « heart change » prévisible de Queenie et puis petit caméo de Tina à la fin du film et petite discussion de Dumbledore en mode, olala Norbert je n’aurai pas pu y arriver dans le film sans toi. Sauf que Norbert, à part transporter une valise dans ce film, il ne fait rien.

Conclusion

Je suis terriblement déçu de ce film, après un second opus qui élevait un peu le niveau en insistant sur le côté dark de Grindelwald, le film fait une sorte de retour en arrière entre le dark et le fantasy comédie à deux balles et ça ne marche pas, bourré d’incohérences, bourré de non sens, bourré de morale à la Disney qui ne sied pas à cet univers mature à la base, le film se concentre péniblement sur les Dumbledore, quitte à envoyer valser les personnages principaux des deux précédents films, qui sont inexistants ou vides, ou remplacés par un autre acteur ou volontairement absents parce que certains acteurs ne veulent plus s’impliquer dans un projet supervisé en partie par JK Rowling.

Se relever de ce film sera difficile. Je n’ai même pas envie de voir la suite, alors que c’était le cas après le second opus. 4 ans d’attente pour une daube pareille. Désormais cette saga va sombrer dans les méandres de l’oubli. A la manière d’une scène dans le film, si l’on pouvait lancer un sort collectif pour l’effacer des mémoires, ce serait pas plus mal.