Les Aventures de Rabbi Jacob par Coty
La religion au cinéma n’est pas forcément un thème sérieux. Tous les films abordant ce sujet ne traitent pas de privations, de couvent et de prières. La preuve en un exemple : Les Aventures de Rabbi Jacob. Il suffit de rappeler que ce film est de Gérard Oury et qu’on y retrouve notre Louis de Funès national dans l’un de ses rôles les plus célèbres pour savoir que c’est un concentré d’humour et de gags.
Certes, Les Aventures de Rabbi Jacob traite du sujet plus large du racisme et de l’intolérance, mais il parle tout de même beaucoup de religion. Quand on est encore tout jeune et qu’on le regarde pour la première fois, on peut en apprendre beaucoup sur les us et coutumes de la religion juive. Un point. On voit aussi que la religion est au cœur des sources d’intolérance. Deux points. Au-delà des croyances, qui sont très loin d’être au cœur du film, ce sont les traditions liées à chaque religion qui crée cette intolérance, parce qu’elles créent des groupes de personnes identifiables. Et Les Aventures de Rabbi Jacob joue beaucoup là-dessus, avec succès. La religion y est matière à galéjades et ces dernières s’enchaînent avec une efficacité qui ne faiblit pas avec le temps.
Ce film sorti en 1973 reste un pilier du cinéma français et continue de plaire aux nouvelles générations. Les termes Rabbi Jacob renvoient à un cliché dans la conscience française, alors même que la figure du rabbin est généralement assez peu connue.
Mais pour ne pas juste vous dire « allez voir Les Aventures de Rabbi Jacob ! » si vous ne connaissez pas encore ce film culte, ou « ce film est un film (en partie) sur la religion et il est très intéressant. » histoire de vous convaincre qu’il a sa place dans ce dossier, laissez-moi vous raconter un événement qui a suivi la sortie du film, nouvelle preuve de la place centrale de la religion dans le film et de la sensibilité du sujet. Cette sortie coïncida avec la guerre du Kippour et dans ce climat religieux tendu, le film a provoqué par son caractère religieux des réactions violentes et inattendues…
La femme du publiciste en charge de la promotion du film a détourné un avion le jour de sa sortie et a menacé de le faire sauter si le film n’était pas interdit. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle trouvait ce film politique, anti-arabes et pro-sémites. Elle ne pouvait pas laisser sortir un film pareil, que vouliez-vous qu’elle fasse d’autre ?! Finalement, l’avion a pu atterrir et cette terroriste en herbe a été abattue d’une balle en pleine tête. Tout est bien qui finit bien. N’empêche qu’on a quand même réussi à qualifier ceci de coup publicitaire pour le malheur de Gérard Oury qui a reçu plusieurs lettres d’insultes et de menaces.
Voilà une belle histoire que vous pourrez ressortir pour briller en société ! Et une nouvelle piste de réflexion sur la bêtise humaine. Et une nouvelle preuve de l’interprétation très différente que deux personnes peuvent avoir d’un même film. Et une raison supplémentaire de découvrir ce film si ce n’est pas déjà fait (oui je me répète mais seulement parce que c’est important) ou de le revoir si vous croyez avoir compris comme cette chère demoiselle morte de sa balle dans la tête.
(NB : cette critique a originellement été écrite pour un dossier sur le thème de la religion)