Ca ne fait rien, on vous garde quand même
Les aventures de Rabbi Jacob c'est pour moi un film d'enfance que je viens de revoir avec ma vieille VHS dont le début est un rien abimé par l'usure du temps et les petites mains d'un enfant qui adorait le générique.
Avec le temps je pense encore que c'est une bonne comédie, surtout si vous appréciez les grimaces et le jeu de Louis de Funès.
Victor Pivert - bon français, bonne situation, marié - va découvrir durant nombreuses péripéties (aussi nombreuses que les plans, il y en aurait plus de 2000) son semblable.
Je crois qu'un thème cher à Gerard Oury, le réalisateur, c'est le changement. Tout le monde peu changer, peu importe son âge et peu importe le connard qu'il semble être.
C'est en tout cas ce qu'Oury veut nous faire passer dans certains de ses films.
Si dans La grande vadrouille, le personnage de de Funès finit par devenir "bon", via la résistance, prêt à aider ses amis alors qu'il n'aurait pas donné une chemise ou même un vélo durant ce parcours un rien initiatique, ici lors de ce nouveau chemin il va s'affranchir de son racisme en gagnant en tolérance.
Le meilleur moyen d'éradiquer ce racisme c'est de dissiper la peur de l'inconnu en découvrant "l'autre". C'est là le gros message véhiculé par ce film.
Les formes de racismes sont multiples et toutes n'y sont pas décrites, j'en ressors au moins qu'il ne s'agit pas seulement de l'antisémitisme. Gérard Oury étant d'origine juive, le sujet le tient à coeur. Pour moi le choix du parcours juif part de là, autant parler de ce qu'il connait.
Monsieur Pivert n'aime pas les noirs, les musulmans, le "petit peuple", en bref il n'aime que les gens "comme lui"... Et encore !
Si Pivert ne considére pas que sont racisme soit un défaut, il n'aime guère être rabaissé par des remarques de son "petit" chauffeur sur sa relation avec sa femme qui porte le pantalon. Encore moins quand un "bicot" plus fin et plus cultivé lui fait des remarques sur ses lacunes, sur la religion juive notamment.
D'un point de vue historique, la sortie du film précède (merci wiki) de deux semaines celle de la guerre du Kippour qui opposa Israël à une coalition menée par l'Egypte et la Syrie durant le mois d'octobre 1973. Le nom du Kippour vient du fait que la coalition a attendu cette fête juive pour attaquer, provoquant l'effet de surprise. Le principal allié de l'Etat d'Israël était les USA qui fournirent des armes et en différents types de matériel militaire, entrainant ainsi un embargo pétrolier ce qui provoqua la crise pétrolière de 1973, le premier choc pétrolier.
La relation de bonne entente, via l'acceptation de l'autre, et donc une belle idée durant cette actualité un rien morose.
Mais cela n'aide pas avec ce qui se tourne à côté du film, le 18 octobre 1973, jour de la sortie du film à Paris, la femme du publicitaire du film, Georges Cravenne, détourne seule et par les armes un Boing 727 qui devait faire Paris-Nice. Pour elle le film est anti-palestinien et doit être retirée des salles. Instable psychologiquement, cette dernière sera tuée par les forces de police. Certains n'hésiterons pas à crier à une action volontaire, d'un coup de marketing orchestré en faveur du film...
Pour l'anecdote, le café visible au début du film ou Slimane se fait enlever fait écho au rapt, en 1965, de El-Mehdi Ben Barka, principal opposant au roi du Maroc Hassan II à la brasserie Lipp. Ici il s'agit, toujours dans le 6ème arrondissement du café Les Deux Magots. Repère de nombreux surréalistes ainsi que bon nombre d'artistes. On retrouve ce café dans un autre grand succès du cinéma français, le récent Intouchables.
Rabbi Jacob a de nombreux défauts, je le trouve bien trop rapide pour un fond aussi large et aussi fort. Des moments un rien exagérés, à vouloir en faire toujours plus fort, qui dénotent pas mal avec de bons moments d'humour ou d'émotions avec des scènes telles que la poignée de mains entre Slimane et Salomon ou celle des remerciements de Rabbi Jacob-Pivert envers les commerçants et la danse qui s'ensuit. Ca m'a fait plaisir de le revoir, c'est l'essentiel à mes yeux.