Après s'être consacrée à un cycle sur son défunt mari Jacques Demy (Jacquot de Nantes, Les demoiselles ont eu 25 ans), Agnès Varda a célébré les 100 ans du cinéma (généralement né en 1895) en conviant un maximum de vedettes de la famille, voire en en ressuscitant. Les Cent et une nuits de monsieur cinéma citent et évoquent (directement) des œuvres déterminantes, l'usage de certaines techniques ou de scènes spécifiques (tirées de King Kong ou La Soif du Mal par exemple), fait défiler les acteurs, les fétiches et se réfère même aux sociétés de production.


Varda joue sur un ''littéralisme'' poétique (avec au sommet dans cette optique les frères Lumières) et l'annonce dès le titre, puisque le cinéma est personnalisé par un vieux « monsieur » de 100 ans, interprété par Michel Piccoli emperruqué. Des cinéastes et acteurs viennent le retrouver. Marcello Maiestronni s'interprète lui-même comme il l'a toujours fait, des poids lourds comme Depardieu livrent leurs ressentis sur certains tournages, certains invités ne font que passer comme Delon. Au fond tout le monde défile et survole même lorsqu'il y a étalage. Ces 101 nuits sont l'occasion d'une grande fête mais l'orchestration est trop passive pour faire des désirs une réalité, même reconstituée.


En parallèle des échanges avec 'Monsieur Cinéma' s'accumulent les extraits de films passés jugés majeurs, des gens de cinéma à l'ouvrage, les pérégrinations de Gayet auprès de ses amis. La future Miss Hollande vient au chevet du centenaire à l'ouverture du film et incarne la descendance attirée mais volage. Usine à spoil et blagues Carambar du 7e art, Les 101 nuits est foisonnant, remplis de décalques (Bunuel et son œil de veau), mais non raffiné à tous degrés. Les digressions sont prosaïques et s'arrêtent toujours où elles ont commencées, les commentaires sont décousus et au maximum de son inspiration le film laisse articuler des bavardages complaisants, en général 'joués' ou re-joués par les statues encore vivantes du musée Cinéma.


L'enthousiasme 'en impose' grâce à l'ampleur des productions à défaut d'éblouir pour leurs qualités : Varda et ses invités jouent avec les anecdotes, récitent et biaisent, reconstituent. Le montage cherche à induire l'ivresse, les convocations et gadgets incessants à émerveiller (comprendre : empêcher le moindre blanc, chasser le recul ou les pensées qui pourraient parasiter). C'est un peu comme du Michael Bay où on arrêterait de casser les jouets et déverserait sa tendresse partout. Le seul élément à vaguement en extraire est une once de pessimisme balayé par la foi dans les vertus régénératrices du kitsch, via l'intervention de la fausse Liz Taylor prise pour la vraie par Mr cinéma le grabataire. Sa libido fanée aura pris le pas sur sa mémoire moisie, dans ses rêves du moins.


https://zogarok.wordpress.com/2016/05/12/les-cent-et-une-nuits-de-monsieur-cinema/

Zogarok

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