Pour reprendre un peu ce que disait @Kenshin j’ai été assez frappé par une sensation qu’aucun film d’animation —qu’il soit signé Pixar ou même Dreamwork— ne m’a provoqué jusqu’à présent : celle d’être un adulte.

C’est étrange comme d’ordinaire je balaie cette notion avec un naturel déconcertant devant n’importe quelle production (nanar, SF, fantastique, animation, bis etc) et de me retrouver face à Rise of the Guardians avec le constat d’une amère vérité : je ne suis plus un enfant et ça craint vraiment.

Pour une fois, un film d’animation porte ses codes à un niveau tout autre, pour servir ses buts premiers : susciter l’émerveillement, et distraire.

Attention, je ne dis pas que Rise of the Guardians est un chef d’œuvre.

Je dis que pour une fois on oublie l’humour frontal caca prout du genre qui fout l’urticaire vu chez des personnages à la Jar Jar Bings ou Sid (Ice Age).

Je dis que pour une fois le personnage central n’est pas un insupportable connard impétueux mais un héros aussi lunaire qu’espiègle dont l’énergie vitale n’a d’égale que la puissance mélancolique de ses traits.

Je dis aussi qu’il me semble ne pas avoir eu envie d’étrangler les enfants du récit, ce qui constitue, croyez moi, un précédent sans précédent.

La réussite du dernier Dreamwork réside dans l’abandon de facilités propres au genre tout en en conservant la solide simplicité. Là où Pixar commence à se masturber de façon aussi ostentatoire que stérile, la boite à tonton Stephen réinvente et s’applique.
Pas de prouesses techniques, mais une rigueur esthétique souvent saisissante. En témoignent de nombreux mo(uve)ments de bravoure au dynamisme quasi virtuose, des plans empruntant leur impact visuel à l’impressionnisme allemand (les séquences impliquant Pitch, et notamment le premier affrontement avec Jack), et une cohérence et un savoir faire graphique indiscutable (les décors urbains, la beauté des regards, entre autre).

Et si les personnages coulent de source, leur incarnations ne manquent pas de piquant ni de saveur, les auteurs se permettant au passage quelques touches d’humour assez fin (la mention de la filiale européenne des fées des dents, irrésistible), ainsi que quelques libertés appréciables (le lapin de Pâques aux armes d’indigène australien, le marchand de sable muet).

Rise of the Guardians tient donc toutes ses promesses, tant formelles que narratives. Une histoire somme toute simple et balisée mais qui laisse un attachement inhabituel pour son personnage principal, et insuffle un peu de cette nostalgie de l’enfance à la fois divertissante, fraîche et douce amère que peu de récits suscitent.

On freeze le très bon sur ce coup.

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le 13 mai 2013

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real_folk_blues

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