Cela fait maintenant quelques semaines que j'explore le cinéma asiatique, continuant d'approfondir certains metteurs en scène et en découvrant d'autres, c'est au tour de Kenji Mizoguchi avec Les Contes de la lune vague après la pluie qu'il réalise en 1953 alors qu'il avait déjà plus de 30 années de carrière derrière lui et plus que 3 devant...
Ici il nous emmène dans le Japon du XVIème siècle où la guerre civile bat son plein pour y suivre deux villageois, un potier et un paysan, qui vont partir en ville pour espérer y trouver richesse et/ou réaliser leurs rêves. Adapté de plusieurs histoires écrites par Ueda Akinari, on va y suivre le parcours de ces deux hommes attirés par l'argent et la grandeur au point de leur faire perdre le sens des réalités et de les entrainer dans une chute inévitable où, que ce soit eux ou leurs proches, ils n'en ressortiront pas indemnes.
Il se sert du contexte de la guerre qui offre quelques opportunités pour dresser un portrait peu tendre de l'être humain où la cupidité et l'égoïsme peuvent primer sur le reste. C'est avec intelligence et surtout puissance qu'il montre les conséquences des actes des deux villageois, où Mizoguchi les entraine dans une terrible descente en enfer. Le récit est passionnant et très bien exploité, le cinéaste japonais y inclut quelques touches surnaturelles qu'il maitrise avec brio et joue avec la frontière entre le rêve et le réel, tant dans l'esthétisme que dans l'avancement de l'histoire.
Si l'écriture est déjà de qualité, elle bénéficie surtout d'une mise en scène qui en est à la hauteur où Kenji Mizoguchi met en place une ambiance sombre et fascinante, proche du surnaturel. Se montrant brillant derrière la caméra (mouvement, plans etc), plusieurs séquences sont magistralement orchestrées tandis qu'il capte à merveille les sentiments et sensations des personnages. Il arrive à faire ressortir toute le force et la richesse de son récit, montrant certains aspects abjects de l'humain avec intelligence mais aussi certains points comme le pardon et l'amour.
C'est au coeur du Japon du XVIème siècle que je découvre le cinéma de Kenji Mizoguchi avec Les Contes de la lune vague après la pluie et c'est avec force, intelligence et talent qu'il étudie l'humain à travers une descente aux enfers aussi terrible qu'effrayante. (et merci à Jurassic pour la recommandation !)