"Mme de la Pommeraye pressentit qu'elle n'était plus aimée, il fallait s'en assurer, et voici comment elle s'y prit…" Diderot : Jacques le Fataliste.


Le titre du film, digne d’un tableau impressionniste, cache élégamment le plaisir toujours procuré par le spectacle d’ un thème vieux comme le monde : la vengeance d’une femme. Mme de la Pommeraye, Hélène dans le film (Maria Casarès), délaissée par son amant, lui fait rencontrer « par hasard » Agnès au bois de Boulogne.


Agnès (Elina Labourdette) que l’on a vu précédemment danser devant un public masculin, coiffée d'un haut de forme, les longues jambes gainées généreusement exposées, est la victime collatérale, plus oie blanche que grue, en dépit des imprécations d’une Hélène en souffrance,  veuve implacable toute de noir vêtue, véritable araignée tissant patiemment sa vengeance. Jamais à court d’inspiration, elle mène le jeu tout en faisant croire à sa générosité désintéressée.


« Je n'ai jamais haï personne comme j'ai haï Robert Bresson sur le plateau. »Très injuste à l’égard de Bresson qui lui a donné l’un des rôles qui lui correspondait le mieux, Maria Casarès personnifie la vengeance, Némésis maniant à merveille l’ironie pour mieux cacher sa détermination, en face de laquelle le faible amant (Paul Bernard) a peu de chances de s’échapper.


Le scénario des dames du bois de Boulogne révèle des subtilités qui réussissent à faire surmonter les réticences légitimes quand on aborde un film de Robert Bresson : l’austérité, l’enfermement et la lenteur sont moins ressentis qu’à l’ordinaire. Le contrôle permanent des volontés de théâtralité dans jeu de Maria Casarès permet ici de se concentrer sur le thème choisi : celui de la vengeance.


Le récit initial de Diderot, qui fait partie des illustrations de la théorie du déterminisme :liberté et prévision sont des illusions, tout est écrit en dépit des plans les mieux échafaudés, possède une légèreté intrinsèque. Jacques le Fataliste est une compilation de nouvelles qui semblent avoir été composées pour aider l’auteur de l’Encyclopédie à décompresser.


L’adaptation de Diderot et les dialogues très littéraires de Cocteau sont réunis pour réaliser une œuvre moins austère que d’ordinaire.

Zolo31
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le 10 sept. 2020

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