En 1921, D. W. Griffith retrouve à nouveau Lillian Gish, ainsi que sa sœur, pour adapter la pièce Les Deux Orphelines d'Adolphe Ennery et Eugène Cormon, et lui permettre de mêler fresque historique et drame sentimentalisme par le prisme du destin de deux sœurs durant la Révolution Française.


Autant tout de suite évacuer un point délicat que je n'ai pourtant pas trouvé gênant pour apprécier le récit, l'idéologie de l'oeuvre et la relecture de la Révolution française selon Griffith. Ici il ne brille pas par sa subtilité comme en témoignent quelques phrases de l'introduction telle que :



the new gouvernement,
established by the pussy-footing Robespierre
through Anarchy and Bolshevism



Il se sert clairement de la Révolution Française pour exprimer la crainte de l’Amérique, le bolchevisme et défendre le système de son pays. C'est aussi par le portrait de certaines personnalités de notre que Griffith s'approprie cet événement majeur, surtout Danton et Robespierre où le premier est très idéalisé, au contraire de l'autre.


Ce n'est pas si dérangeant car Griffith axe surtout Les Deux Orphelines sur la relation et le destin tourmentés des deux sœurs qu'il met en scène dont l'une deviendra aveugle. On s'intéresse puis s'attache à eux, notamment par la façon dont il les laisse sans défense, séparées et affaiblies dans un Paris sans pitié, que ce soit dans les bas-fonds ou dans les hautes sphères sociales décrites comme décadentes et cruelles.


Ce qui marque, c'est la maîtrise totale du mélodrame dont fait preuve Griffith, il fait ressortir toute l'émotion des personnages et enjeux, sachant rendre son récit passionnant tout en y donnant une dimension lyrique, puissante et romanesque. II fait preuve d'une remarquable justesse dans le traitement des sentiments mais c'est aussi par sa description de la foule et la façon dont il met en scène cette révolution et ce Paris coupé entre les riches et les pauvres qu'il démontre tout son savoir-faire.


La reconstitution est superbe et parfaitement mise en valeur par sa caméra, ce qui est aussi vrai pour sa façon de capter les mouvements de foule. Les notes de piano accompagnant l'oeuvre sont adéquates à l’atmosphère générale du film alors que Lillian Gish est aussi attachante que touchante et magnifique. Les deux sœurs retranscrivent à merveille les émotions et la profondeur des personnages.


Avec Les Deux Orphelines, Griffith mêle son sens de la reconstitution et sa maîtrise du mélodrame pour proposer une oeuvre touchante, magnifique et dont l'émotion ressort des personnages et enjeux.


Et rien que pour ça, on peut lui pardonner sa propagande et sa réappropriation faussée de l'histoire de France.

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le 3 nov. 2014

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Docteur_Jivago

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