Dans ma caboche d’homme du XXe siècle un peu épais, voire grossier, Les enfants nous regardent posait un problème irréductible : il lorgne vers le mélodrame. Vers le putain de mélo à la con. Vers les films qui sont censés faire pleurer – mais celui-ci n’a pas stimulé mes glandes lacrymales. Or, c’est aussi le principe du mélodrame : s’il ne fait pas pleurer, il ne lui reste plus grand-chose.
Les enfants nous regardent serait-il alors ce qu’on appelle un film social ? L’évocation de la petite bourgeoisie italienne des années 1940 n’est pas ratée, mais enfin cela ne suffit pas à faire un bon film. Je peux aussi admettre qu’avec le temps et l’évolution des mœurs, le film ait perdu de sa charge subversive, mais si l’on admet qu’il y a des œuvres novatrices pour leur époque, il faut aussi admettre qu’il y en ait des ennuyeuses pour la nôtre. De même, les états d’âme de Paola qui trompe Giovanni avec Carlo (ou de Michael que Mary trompe avec Tommy, ou de Vladimir qui trompe Igor avec Ivan, ce n’est pas le problème) sont peut-être un bon sujet de souvenirs de famille, mais est-ce encore un bon sujet de film ?
En dépit de cela, les scénaristes ont réussi à construire quelque chose de fluide et qui tient la route.
Mais le principal problème du film, à mon sens, tient aux comédiens qui, à l’exception d’Emilio Cigoli (le père), peinent à donner à leur personnage une envergure un peu plus large que celle de caractères – l’enfant, la mère, la bonne, l’amant, etc. Peut-on dire que ces personnages ne sont pas écrits, je l’ignore, en tout cas ils restent très peu développés, comme souvent dans les films qui entendent démontrer quelque chose. Or, si Les enfants nous regardent préfigure le néoréalisme, c’est peut-être aussi dans la mesure où il n’est pas loin du film à thèse.
P.S. – Vu le film en DVD (Tamasa / Studiocanal). Le chuintement de fond de la bande sonore et les sautes de luminosité d’un plan à l’autre (DVD pas restauré) n’ont pas rendu l’expérience plus agréable.