Boîte à rêves
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Peinture extraordinaire, lucide, précise et en même temps impitoyable des milieux hollywoodiens, les Ensorcelés est sans aucun doute le film sur le cinéma qu'il faut avoir vu pour comprendre comment ça se passe dans les coulisses de la création à la grande époque. De la conception initiale du projet au lancement du produit final, en passant par les essayages de costumes, les signatures de contrats, la conception des décors, le personnel alloué aux stars etc... la fièvre et l'angoisse hantent des personnages en quête de rêve. Fasciné durant toute sa carrière par ces rapports du rêve et de la réalité, Vincente Minnelli trouve ici un terrain idéal.
Parmi les personnages : un réalisateur frustré, une star sortie du caniveau, un scénariste éteint qui ont tous trois travaillé avec Jonathan Shields, un producteur brillant mais avide qui a connu un revers de fortune. Ce dernier les a utilisé bassement pour servir ses intérêts : il a tiré Georgia la star de l'alcoolisme et de la déchéance en lui faisant croire qu'il l'aimait, a fait débuter Fred Amiel le réalisateur puis l'a trahi en faisant réaliser par un autre un projet sur lequel il comptait, et a obtenu son meilleur scénario de Barthow en jetant sa femme dans les bras d'un séducteur. Ces 3 êtres ont donc des griefs contre celui qui a tiré d'eux le meilleur pour assurer la qualité des films qu'il produisait. Il n'est pas impossible que Minnelli se soit inspiré de personnages authentiques, on pense en effet à Irving Thalberg, jeune directeur de production de la MGM dans les années 30-40, à David O'Selznick, à Fritz Lang etc...
Mais les Ensorcelés est plus qu'un film à clés, c'est une véritable oeuvre d'amour dédiée à Hollywood. La façon dont Minnelli décrit une première projection, l'atmosphère d'un tournage, et le job d'un producteur ambitieux, tout ceci reste exceptionnel, il décrit les métamorphoses du pouvoir à travers le portrait de Shields qui utilise les gens à sa disposition comme des marionnettes, il stigmatise la volonté de puissance, l'arrivisme forcené, l'art du mensonge qui ensorcèle les naïfs, et le machiavélisme qui prend ces mêmes naïfs dans ses filets. L'interprétation est l'atout majeur de ce film qui est servi par des acteurs en état de grâce : Kirk Douglas y trouve un de ses rôles les plus puissants, Lana Turner y est somptueuse, Walter Pidgeon, Dick Powell et Barry Sullivan ne retrouveront pas des rôles aussi forts, sans oublier la troublante Gloria Grahame, Gilbert Roland, Leo G. Carroll ou Paul Stewart qui complètent un casting très riche.
Peu de films ont analysé et décrit avec autant d'acuité les affres de la création cinématographique, c'est l'un des meilleurs films de l'auteur de Un Américain à Paris et les Quatre cavaliers de l'apocalypse, je lui reconnais ce crédit, mais je ne goûte pas forcément l'atmosphère de cette peinture cruelle hollywoodienne. Ceci dit, c'est un film important qu'il faut voir absolument.
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Créée
le 8 déc. 2017
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