Machisme innocent
Un puissant industriel recherche un directeur général. Il décide d'inviter trois candidats à New York pour les évaluer, et convie également leur femme, qui feront aussi l'objet de l'évaluation...
Par
le 27 août 2020
Je ne sais pas très bien ce que je dois penser de ce que je viens de voir.
C'est une de ces comédies de moeurs bien écrites et bien rythmées qui se passent à New York, comme Hollywood savait en faire dès les années 1930.
Trois hommes sont en concurrence pour prendre la tête de la division vente des usines automobiles Gifford. Leurs femmes aussi ont été invitées. Car le patron, un homme maniéré et sophistiqué, a son idée : juger à la fois les capacités de l'homme, mais aussi celles de son épouse.
Des trois couples, chacun a ses points forts et points faibles. Dans le couple du Kansas, l'homme est très compétent ET est un bel être humain, mais sa femme est socialement une catastrophe ambulante.
Dans le couple de Philadelphie, l'homme est un ouvrier qui a gravi tous les échelons, un bourreau de travail. Il cache qu'ils sont sur le point de se séparer avec sa femme, qui l'accuse de vouloir se tuer au travail. Sitôt qu'il aura le job, elle le quittera.
Dans le couple du Texas, l'homme est assez conquérant et original ; sa femme est d'une beauté qui écrase ses rivales (elle tente d'ailleurs ses charmes sur le patron).
Le film, entièrement tendu vers son dénouement (vraiment comme dans un Whodunit ?, mais ici plutôt un Whowinsit ?), sait maintenir le suspense, et montre une certaine nuance : les épouses soutiennent leurs maris mais ne cherchent pas forcément à se tirer dans les pattes.
On apprend à connaître ces personnages, car après chaque étape, on voit leurs conversations en couple, dans leur chambre d'hôtel, à débriefer la journée. Il y a le premier contact, lors d'un cocktail donné au siège de l'entreprise ; puis une journée de visite des usines et du terrain d'essai (véritable publicité ambulante pour l'industrie automobile américaine triomphante). Enfin il y a l'invitation au cottage du patron, avec sa mère qui fait office de second juge informel des épouses.
Et puis, arrive le dénouement. Il s'avère que l'épouse du Kansas s'offre au patron, qui révèle que l'époux n'a pas été choisi. Celle-ci, furieuse, court faire une scène à son mari, qui la répudie. Arrive le repas : après un suspense insoutenable, le patron révèle que c'est l'homme du Kansas qui est pris, car il a su identifier son point faible : sa femme, qui lui obtenait des promotions en échange de séance canapé avec le supérieur. Les deux autres couples, qui entretemps ont compris que cette promotion menacerait leur bonheur, sont finalement soulagés.
En soi, ce dénouement n'est pas machiste. Il signifie qu'un homme doit mériter son avancement pour ses qualités, pas celles de son épouse. Mais la manière dont le film l'amène, comme si écarter la vamp arriviste permettait de se retrouver entre gens de bonne compagnie, est terrible et a quelque chose qui ne passe plus aujourd'hui.
Cela n'enlève rien au travail des dialoguistes, qui savent brosser des scènes intimistes touchantes, comme quand le couple au bord de la rupture se sépare, se retrouve par hasard au restaurant de leurs fiançailles et retrouve même l'ancien serveur devenu patron, avec des sentiments mélancoliques qui n'ont besoin que d'être suggérés. C'est ce qu'Hollywood réussissait de mieux, ça, à l'époque des Nicholas Ray et compagnie.
Donc je ne jète pas le bébé avec l'eau du bain, c'est un film fort honnête, même si son dénouement le dessert au vu des évolutions de notre société.
En tout cas : des hommes ambitieux, des femmes-trophées, des bagnoles, Manhattan, des personnages ambitieux et ambigu, un happy ending : essaie d'être plus fifties que ça, mec !
Créée
le 6 févr. 2025
Critique lue 7 fois
D'autres avis sur Les femmes mènent le monde
Un puissant industriel recherche un directeur général. Il décide d'inviter trois candidats à New York pour les évaluer, et convie également leur femme, qui feront aussi l'objet de l'évaluation...
Par
le 27 août 2020
Du même critique
C'est ce genre de film, comme "La dernière tentation du Christ" de Scorsese", qui vous fait sentir comme un rat de laboratoire. C'est fait pour vous faire réagir, et oui, vous réagissez au quart de...
Par
le 6 sept. 2013
59 j'aime
10
Milieu des années 1970 dans la banlieue de Seattle. Un mal qui se transmet par les relations sexuelles gagne les jeunes, mais c'est un sujet tabou. Il fait naître des difformités diverses et...
Par
le 24 nov. 2013
43 j'aime
6
"Crossed" est une chronique péchue, au montage saccadé, dans laquelle Karim Debbache, un vidéaste professionnel et sympa, parle à toute vitesse de films qui ont trait au jeu vidéo. Cette chronique a...
Par
le 4 mai 2014
42 j'aime
60