Quand le destin s'acharne à prendre à ceux qui n'ont déjà rien. Deux feuilles mortes tombées d'un arbre, fanées par le désespoir du temps qui passe. Dans ces rues de l'oubli, la Finlande où errent deux âmes si pauvres à en pleurer.
Ansa ( Alma Pöysti ) et Holappa ( Jussi Vatanen ), une lumière endormie face aux défis de la vie. Deux acteurs qui donnent à ce magnifique film, toute la beauté tragique que réalise avec maîtrise Aki Kaurismäki. Un mélange d'ennui et de circonstance jamais heureuse.
Les feuilles mortes nous parlent d'une Finlande, et de tous ces problèmes sociaux, ces déshérités qu'on cache, et qu'il veut rendre visible. Qui aiment s'abandonner dans cette ambiance de dancing, avec un certain minimalisme dans leurs expression, et la gestuelle de tous ces personnages.
Le réalisateur nous propose le cinéma et la musique comme alternatives à une réalité déprimante. Ce film que l'on n'attendait pas vraiment, et ce bar karaoké d'un humour mélancolique, parfois hilarant. Une classe ouvrière qui se retrouve, Ansa et Holappa, en quête de divertissement pour entendre chanter des chansons aux paroles pleines de sens.
Arrive cette scène remplie d'émotion, entre Ansa et Holappa, qui se croisent du regard, un souffle d'amour, une lueur de tendresse. Deux tristesses perdues au milieu de cet océan de misère. Ansa à la rencontre d'une bouteille à la mer, ivre d'alcool, qui ne cherche qu'un peu de chaleur. Elle veut le revoir, il n'attend qu'elle, ils se cherchent, se frôlent, se fuient, lorsqu'elle se rappelle, prisonnière de ces chaînes. Le souvenir d'un homme qu'elle ne veut plus revivre, entre amour sincère et soif qu'il célèbre jusqu'au petit matin.
Mais afin de ne jamais oublier leur histoire, raisonne sans cesse en eux l'écho de ces notes de musique qui les suit, qui bercent leur triste vie, leurs chagrins, et cette guerre qui n'en finit pas.
Alors malgré les tempêtes, les tourments du chemin, ces silences. C'est l'humour et les méandres de leur passion qui semblent indestructible, qui ramènent à la vie. Deux vagabonds liés par le temps, paralysés par l'envie d'être aimés, tel un conte de fée. Peut-être un jour, une nuit, riche d'un printemps. Patiemment elle attend son réveil.