Le bilan de la comédie française en 2014, à l'instar du polar bien de chez nous, est simple : on a rarement autant rit et été aussi séduit dans les salles obscures avec des comédies hexagonales, depuis des années. Douze mois proprement exceptionnel, parsemés de gros succès au box-office (les très moyens Supercondriaque et surtout, Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu), de belles surprises (Hippocrate, Situation Amoureuse : C'est Compliqué, Les Gazelles, Libre et Assoupi) et de confirmations (le retour des Inconnus via Les Trois Frères - le Retour, du duo Ngijol/Eboué avec Le Crocodile du Botswanga ou encore celle du talent génial de la Bande à Fifi avec Babysitting), qui ont permis de sacrément relancer la distribution francophone face à l'écrasante suprématie ricaine dans le genre.


Un élan positif que se doit maintenant de faire perdurer les productions made in France 2015, dont seuls les excellents Toute Première Fois et (surtout) Papa ou Maman, ont réellement su attirer notre attention durant un premier trimestre il est vrai assez maigre en film " comique ". Belle attraction de 2014, Manu Payet avait su injecter un merveilleux coup de nitro dans la romcom hexagonale avec Situation Amoureuse : C'est Compliqué, drôle, finement écrit et clairement pourvu d'un capital sympathie au moins aussi imposant que son réalisateur/interprète vedette.


Touchant en grand enfant obligé de murir, convaincant en wannabe cinéaste capable de divertir sans fléchir sur plus d'une heure et demie, le bonhomme était donc méchamment attendu avec sa nouvelle comédie, Les Gorilles, qu'il porte à bout de bras avec le charismatique Joey Starr. Le hic, c'est qu'aussi prometteur était leur duo sur le papier, le nouveau film de Aurouet (l'excellent thriller Mineurs 27) ne décolle jamais, ne provoque que trop rarement des sourires à son spectateur qui se voit même très vite agacé par la performance un brin laborieuse (pour être poli) du tandem, englué dans un océan de stéréotypes...


Les Gorilles, ou l'histoire d'Alfonso, agent blasé et brutal du Service de Protection des Hautes Personnalités, qui se voit obligé de faire équipe avec Walter, jeune recrue inexpérimentée, fasciné par le monde du show-biz.
Ce duo improbable est chargé de la protection de Jal-Y, jeune star du R’n’B, menacée par son ex, un criminel en cavale. Dit comme ça, le métrage semble tout droit sorti des buddy movies culte des 80's, pitch simpliste et intrigue prévisible mais suffisamment divertissante pour prétendre à un gentil statut de culte avec le temps. Reste que dans l’exécution, loin de péter dans la soie de la subtilité (logique en même temps hein) et encore moins dans celle de la qualité, le nouveau long métrage de Tristan Aurouet ne peut décemment pas prétendre au statut de rejeton légitime des Compères ou encore La Chèvre, et son duo-titre encore moins à ceux d'héritiers direct d'un Pierre Richard ou encore d'un Gérard Depardieu.


L'alchimie entre Payet et Starr ne fait jamais mouche, le premier, agaçant au possible en tête à claques au débit verbal indécent et fasciné par les paillettes de la célébrité, peine à capter l'intérêt - là ou il était séduisant et attachant dans Situation Amoureuse - tandis que le second, bourru et ronchon comme jamais, semble totalement détaché. Que dire du personnage de la jolie Alice Belaïdi, chanteuse traquée au traitement limité et peinant à s'imposer entre les deux vedettes. Peu original, partiellement drôle (le caméo de Gilles Lellouche est très sympa), louchant allégrement sur ses nombreuses références (aussi bien françaises que ricaines), assez tiré par les cheveux et aux personnages manquant cruellement de profondeur - ni sans réelle évolution -, le film accumule tous les poncifs possible du genre et ne se donne jamais vraiment les moyens de se sortir la tête de l'eau.


Court et plutôt bien rythmé, enchainant les gags et les scènes d'action avec plus ou moins (bon mois) de réussite, Les Gorilles incarne un buddy movie lambda qui aurait mérité un poil plus d'ambition scénaristique pour emporter un minimum l'adhésion d'un spectateur ayant déjà vu beaucoup mieux ailleurs - et tout récemment avec 22 Jump Street ou encore Dumb and Dumber De. Vivement donc, que le Manu passe à la réalisation de son second essai sur grand écran...


Jonathan Chevrier

FuckCinephiles
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le 15 avr. 2015

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