Avant de commencer, il faut rappeler que le tournage des Granges Brûlées fut un sacré bazar, marqué par un malaise étonnant entre la personnalité distante et introvertie du réalisateur Jean Chapot et le reste de l’équipe du film assez gênée. En effet, malgré la qualité du film et de son scénario dont il est l’auteur, celui-ci était incapable de se faire comprendre et de diriger convenablement les acteurs, les laissant ainsi dans l’embarras à chaque scène.
Delon totalement agacé, lui reprocha son manque de mainmise et de rigueur. Comme apeuré par la taciturnité du Guépard, et peut-être aussi par un manque de courage, Chapot fut inapte à terminer le film. Il ne prit même plus la peine de se rendre sur les lieux du tournage afin de mener le polar à son terme. Delon enfila donc le costume de réalisateur pour la seule et unique fois de sa carrière et le résultat fut plus que correct.
Place au film désormais après ce contexte quelque peu déroutant. Le corps d'une jeune femme est retrouvé sauvagement assassiné près de la ferme isolée des "Granges Brûlées" tenue par Rose Cateux (Simone Signoret). Le travail de la police commence et le juge d'instruction, Pierre Larcher (Alain Delon), en vient rapidement à soupçonner les deux fils dont l'attitude et les alibis sont douteux.
Dans Les Granges Brûlées, on peut retrouver une panoplie de grands seconds rôles français des années 70 en la personne de Paul Crauchet, Jean Bouise ou encore Christian Barbier sans oublier Miou-Miou et Catherine Allegret chez les dames.
Le film utilise à merveille son cadre rustique et enneigé, établissant immédiatement un ton mélancolique qui reflète le malaise général de la famille Cateux. Cependant, si l'histoire se déroule d'abord comme un polar habituel, le cœur du film est la relation entre Rose, la matriarche, et Larcher le juge d’instruction. Très respectée dans la région, Larcher en vient à admirer la cheffe de famille. En effet, il y a une sorte de respect mutuel, voire de l'affection entre les deux personnages, malgré la scission judiciaire à laquelle ils sont confrontés.
En dépit de tout le remue-ménage de son tournage, accompagné d'une bande sonore géniale signé Jean-Michel Jarre, pionnier de la musique électronique made in France, Les Granges Brûlées vaut vraiment la peine d'être vu si vous êtes client des polars à la française de cette époque.