J'y allais avec une certaine prévention (la Guerre d'Algérie n'est pas un épisode particulièrement glorieux de l'histoire de France), mais j'ai accroché dès les premières minutes.
Mon titre résume exactement ce que j'ai pensé du film.
L'histoire des harkis est à la fois dramatique et forcément complexe à raconter (en plus d'être un sujet sensible) et je craignais la prise de tête. Mais non, les scénaristes ont réussi à présenter cet aspect particulier de la Guerre d'Algérie (1958-1964), de façon très simple, très sobrement, en mode mineur et sans, non plus, se moquer du monde.
Ça a pu se passer à peu près comme ça dans la vraie vie... même si on sent quand même que c'est du cinéma et que les soldats qu'on voit à l'écran sont des acteurs payés pour leurs rôles ou leur figuration (ils ne sont pas assez tendus, pas assez travaillés par les émotions : l'angoisse, la peur, à chaque instant, de se prendre une balle dans le coeur, un couteau en travers de la gorge ou une grenade dans la tronche, ou au contraire, la colère, la haine, le fanatisme silencieux mais résolu).
Le film évite la prise de tête (en simplifiant un maximum), mais ausssi la boucherie et... c'est tant mieux, car les braises de cette "guerre de décolonisation" ne sont pas encore tout à fait éteintes. Et tel que, ça donne quand même un bon film. On suit l'histoire d'une harka, une formation de harkis, et de ses deux lieutenants français : l'un assez cliché, dur, "méchant", l'autre humain, compréhensif, "gentil", et dans le cours de l'histoire, cette harka est, à ce qu'il semble, partagée en deux pelotons avec un lieutenant à la tête de chacun (le film étant parfois elliptique, j'ai un peu perdu le fil à ce niveau-là). On suit cette harka depuis le début de sa constitution (alors que la Guerre d'Algérie en est environ à sa deuxième année) jusqu'à la signature des accords d'Evian entre le Général de Gaulle et le FLN, donc à la fin de la guerre et ce qui en découle : la dissolution des harkas et, pour les harkis, un lendemain plein d'inquiétude. Que vont-ils, eux et leurs familles, devenir ?
Pendant 80 minutes (le film est assez court), on est transporté en plein bled algérien, un pays sec , aride, pierreux, avec des moutons, des chèvres, des ânes et, bien sûr, des gens de là-bas, des paysans mahgrébins, presque médiévaux, aux visages brûlés par le soleil. Ça fait peut-être un peu carte postale de l'Algérie des années cinquante-soixante, mais c'est quand même assez réussi (malgré la modicité des moyens, côté production).
L'espèce d'amitié, qui se noue au fil des semaines entre ces soldats, militaires Français d'origine ou par choix (plus ou moins forcé par les circonstances), est décrite simplement, sobrement (ces mots-là me reviennent au bout des doigts), avec pas mal de justesse. Et c'est très correctement photographié, casté et joué. Il n'y a pas de fausses notes criantes.
L'histoire est sans doute édulcorée (il y a notamment très peu de scènes de violence), mais elle est intéressante de bout en bout. On ne s'ennuie pas. Et on perçoit parfaitement le drame de ces hommes qui avaient, pour mille raisons diverses, choisi la France et qui se retrouvent confrontés à la terrible évidence (presque économique) du : on a besoin de vous, on vous enrôle ; on n'a plus besoin de vous, vous encombrez, on vous dégage, démerdez-vous.
Le propos n'est sans doute pas neuf, mais le film est une bonne piqure de rappel de tout ça.
Certains diront sûrement que le film traite de façon simpliste et sans nuances la tragédie des harkis (et de leur vie ou survie après la guerre). N'ayant pas de grandes connaissances du sujet, je prendrai la tangente en répondant de façon classique : j'ai vu énormément de films dans ma vie, dont un certain nombre traitant de sujets politiques ; celui-ci ne me laissera pas un souvenir inoubliable, mais c'est un bon film, j'en suis convaincu.