On aurait aimé s'embraser pour ce film, brûler d'admiration devant cette illustration de la vie d'une caserne de pompiers, tant sont grandes l'estime et la gratitude vouées à ce corps de métier, à ces soldats qui rejoignent celles et ceux qu'ils secourent au cœur du trauma...
Malheureusement, en accord avec le triste adage, trop souvent vérifié, selon lequel "Trop de ... tue...", ici, trop d'admiration tue l'admiration. En effet, la galerie de portraits brossés par Pierre Jolivet campe une série de soldats du feu tellement héroïsés que, au lieu de susciter l'adhésion pâmée du spectateur, elle provoque plutôt une forme de décrochage. Pourtant, différentes intrigues sont sagement entremêlées, à la faveur des diverses interventions ou enquêtes. La plus intéressante d'entre elles concerne sans doute le jeune pyromane, adolescent autrefois adopté, et l'étrange rituel d'exorcisme que lui propose le chef des pompiers, intense Roschdy Zem au regard plus charbonneux que jamais.
Mais les différentes figures sont trop parfaites jusque dans leurs imperfections : une faute professionnelle, aussitôt assumée, est accompagnée de trop de remords et de démarches de réparation ; le super-pompier, revenant épuisé d'une chaude intervention, parvient encore à honorer son épouse en mal d'enfant, dans la "fenêtre" propice à une fécondation ; l'odieux collègue finit par confesser ses torts, ses incapacités, et tous les conflits levés dans le déroulement du film se résolvent dans un sourire, voire un éclat de rire...
Il n'en reste pas moins que ce dernier opus en date de Pierre Jolivet a le mérite de porter son regard sur un groupe social insuffisamment au cœur des caméras et d'exposer clairement toute l'étendue et la difficulté de son champ d'action. Mais on se surprend à désirer qu'un documentaire s'empare un jour de ce sujet, pour y faire flamboyer toute l'humaine complexité et entraîner véritablement le spectateur au cœur de l'enfer du feu.