Les débiles

La traduction est peut être mal choisie ou alors il n'y a pas d'erreur et dans ce cas Lars Von Trier (ou alors juste ses personnages) font un bel hors-sujet.
Il ne s'agit pas vraiment de faire l'idiot mais vraiment le débile, c'est à dire de singer les handicapés mentaux. Si au début il semble que ce soit juste un passe-temps une activité pour le week end on se rend compte après le passage de l'oncle que faire le débile est une activité à plein temps. Ces personnages qui fuient leurs responsabilités d'adultes deviennent très vite agacants passée la première partie qui est tournée vers la comédie (si déjà vous réussissez à rire des handicapés).
Lars Von Trier a un certain talent pour nous lettre mal à l'aise en poussant plus loin l'exercice du débile, par l'intermédiaire du chef de la bande. Ca passe d'abord par la rencontre avec les handicapés mentaux puis avec le jeu forcé du plus jeune de la bande qui doit réussir à rester dans son rôle pendant toute une après-midi. La scène dans les toilettes est particulièrement bien faite, elle est dans la droite lignée de ce que font les débiles depuis le début du film, mais cette fois ca ne fait pas rire.
Si l'on avait pu qualifier cette bande d'adultes irresponsables, la suite du film nous les présente cette fois comme des enfants.
Le ton très particulier du film atteint son sommet lors de la "partouze de débiles" (avec une pénétration bien visible comme quoi la chasteté du dogme n'est pas à prendre au premier degré) qui se tient au milieu d'un décor de kermesse.
D'ailleurs la scène de poursuite des 3 hommes implorant une de leurs amies de les rejoindre m'a mise particulièrement mal à l'aise.
Et puis c'est le moment où tout bascule, on s'en doutait déjà avec le personnage de Karen, mais un autre personnage ne feint pas l'idiotie. Réfugiée dans la chambre effrayée par la partouze elle est rejointe par un autre membre du groupe. Ce n'est plus le même mode de sexualité des débiles. J'aime beaucoup ce passage dans lequel ils jouent manifestement et pourtant ils sont tellement sincères. En une fraction de seconde ils arrêtent de jouer les débiles redevenant normaux, avant d'épouser leurs "idiots intérieurs".
Après l'arrivée du père, les personnages deviennent par contraste plus adolescent. Le penchant idiot d'un des membres, une douce idiotie qui n'est qu'une altérité par rapport à la norme, est confirmée par la mention des cachets. L'idiotie de l'amant semble moins naturelle, plus la conséquence de son expérience dans le groupe mais elle n'en est pas moins très belle.
Je note tout de même que dans la majorité des cas (dans ce film et ces deux personnages comme dans Breaking the waves), l'idiotie (par contraste avec les garçons qui jouent aux débiles) même si elle est très douce et belle est une catactéristique très féminine chez Von Trier, ce qui me met plutôt mal à l'aise.
De manière générale la violence que fait subir Von trier à la psychée et aux corps des femmes m'empêche d'apprécier ce film qui est quelques fois très beau.
Sur un critère purement esthétique je dois dire que j'aime beaucoup sa manière de filmer même si certaines fois la lumière est particulièrement moche.