Les Indestructibles 2
7.2
Les Indestructibles 2

Long-métrage d'animation de Brad Bird (2018)

Je précise que cette critique contient des spoilers.


Inutile de dire à quel point ce film fut attendu par des légions de fans à travers le monde (le teaser a explosé le nombre de vues sur Youtube en 24h pour un film d’animation avec plus de 113 millions de vues (tiens comme par hasard 113 quand on sait que le A113 revient dans tous leurs films). A sa sortie aux Etats-Unis, le film a rapporté plus de 180 millions de dollars, explosant le record du Monde de Dory. Pixar a connu son âge d'or à la suite du premier volet, avant de voir ces dernières années des critiques émergés sur le fait que leurs films ne prenaient plus de risque et ne faisaient plus aussi rêver et voyager qu’auparavant. Principalement en ne faisant que des suites/préquel de leurs films mythiques.
Brad Bird lui n’a pas chômé non plus puisqu’il est à l’origine de Ratatouille (2007), Mission Impossible : Ghost Protocol (2011) et A la Poursuite de Demain (2015). Si l’on suit les années de sortie, le film aurait dû sortir en 2019 mais les bougres de Disney voyant que son film était en avance alors que Toy Story 4 était en retard (on jugera bientôt) lui ont fait avancer son film d’un an, aussi pour éponger ses « dettes » qui pour moi n’ont pas lieu d’être quand on sait que ces deux premiers films pour le Studio à la Lampe sont deux chefs-d’œuvre ayant cartonné dans le monde et ont tous les deux ramené la précieuse statuette du long-métrage d’animation. Quand on sait qu’il a déclaré qu’il avait des intrigues ou des éléments qu’il n’a pas pu intégrer faute de temps, c’est rageant bien que ça laisse la place à un potentiel troisième et dernier volet !


Ayant eu la chance de le voir en avant-première, je vais maintenant écrire sur le film en lui-même.
Pour moi le film commence de manière épique de la plus belle des façons avec l’introduction du château Disney magnifié avec la thématique du film d’espionnage mêlé à un univers comics des années 50-60 avec en fond les quelques notes du thème des Indestructibles, que l’on reconnait tout de suite. Le tout embelli avec un filtre rouge qui recouvre le château ainsi que le logo Disney <3.
Le film commence enfin et la nostalgie est bien présente !!
Là-encore son début est pour le moins original, si on savait qu’il reprenait juste à la fin du premier film, on découvre ici Tony Rydinger (le copain de Violet) en salle d’interrogatoire qui raconte les événements qu’il a vécu à Rick Dicker (la personne qui aide Bob à se reconvertir et à ne pas avoir de poursuite dans le premier film à la suite de son « accident » avec M. L’œuf). Bref Bird arrive encore une fois à nous surprendre avec cette scène de début. Mais ce qui suit est tout simplement dantesque : une longue scène, haletante, trépidante où on voit la famille Parr en plein action face au Démolisseur. Chacun est mis en valeur et on découvre de nouvelles aptitudes. Les graphismes sont un délice pour les yeux, grand coup de chapeau à Tony Fucile et aux animateurs. Les « figurants » humains, les buildings, les bâtiments sont vraiment saisissant de réalisme et donne à la ville cet aspect de l’Amérique des années 50-60 qui ressort clairement au niveau des voitures ou des vêtements portés par les habitants. Cet esthétique qui faisait ainsi la force du premier volet est encore présent et est même devenu encore plus beau et beaucoup plus léché. Le travail sur les lumières, le cadrage, la photographie et les sons sont remarquables de complexité et nous offre des plans magnifiques. J’avais l’impression que la plupart des plans ainsi que la manière de filmer ressemblait plus à un film live-action qu’à un film d’animation, et ce fut une bien belle surprise puisque cela offre une magnifique photographie sur chaque plan. J’ai eu un coup de cœur pour les scènes d’Elastigirl à moto où le ciel avec ses teintes violettes-rouges font ressortit tout le travail artistique, on aurait vraiment dit un tableau de peintre.


Mais l’amélioration principale (mise à part les graphismes) réside pour moi dans le développement des personnages puisque dans cet épisode on a la chance de les suivre tous (bien que Elastigirl est la plus mise en avant), j’ai vraiment trouvé leur développement intéressant ainsi que leurs nouvelles capacités adaptées à leur personnalité, seuls Flèche et M.Indestructible sont assez en retrait en matière de développement dans la narration puisqu’ils ont toujours le même caractère et aptitude que dans le précédent épisode, l’un est hyperactif et l’autre rêve toujours de revenir dans la lumière. Le développement de Violet est le plus travaillé même si ça reste classique pour Violet avec ses péripéties amoureuses j’ai trouvé l’ensemble bien exécuté puisque cela nous offre des scènes qui alternent l’humour, le pétage de plomb ainsi que des scènes attendrissantes (comme celle de Bob avec Violet). C'était déjà mon personnage préféré du premier film, là elle a encore plus creusé l'écart. La scène du restaurant est déjà mythique pour moi. D’autres personnages sont aussi mis en avant comme Edna Mode et Jack-Jack (où Bird profite de la condition de bébé de ce dernier pour lui donner plein de super-pouvoirs plus loufoques les uns que les autres). D’ailleurs son combat contre le raton-laveur est une merveilleuse idée (emprunté à l'excellent Teddy Newton) puisque ça mêle la curiosité d’un bébé à son intelligence en se servant d'un pouvoir circonstancié pour mettre en difficulté le raton. Leur relation apporte quelque chose de frais au film que ce soit au niveau de l’humour mais aussi du fait qu’on découvre une nouvelle facette dans le personnage d’Edna Mode. Ce n’est pas pour rien que l’humour vient la plupart du temps de ses deux personnages devenus iconiques en seulement un film.


Pour ce qui est des nouveaux personnages, il y a du bon et du moins bon puisque Winston Deavor incarne le milliardaire décomplexé, sûr de lui mais son côté fan depuis l’enfance des super-héros apporte une certaine innocence à son personnage, qui n’est pas sans rappeler Buddy (dans un premier temps) dans le premier film. Sa sœur Evelyn c’est l’image de la « geek, génie des laboratoires et des sciences » mais qui semble préférer concevoir des innovations plutôt que d’interagir avec d’autres humains. Elle est beaucoup plus en retrait que son frère. Pour ce qui est des autres supers j’ai apprécié leur diversité au niveau de l’âge, du sexe et de leurs pouvoirs : Vortex est un personnage réussi pour ma part déjà par l’originalité de ses pouvoirs et de son caractère : fan inconditionnelle d’Elastigirl. J’ai aussi adoré Screech (le Hibou), en revanche les autres sont trop classiques à mon goût. Ce qui est regrettable aussi c’est qu’on ne les voit pas assez et que lorsqu’ils sont contrôlés afin de combattre les Parr, c’est la rapidité avec laquelle ils sont mis hors d’état de nuire qui m’a chagriné. En effet ce sont des « micro-combats » auxquels on assiste, c’est vraiment dommage que les combats ne durent pas plus longtemps. Ça aurait pu donner des scènes encore plus épiques. Cependant les chorégraphies des combats sont très bien réalisées, nous offrant un très beau spectacle.


Passons maintenant à l’antagoniste principal du film : l’Hypnotiseur (je préfère sa dénomination VO Screenslaver qui est beaucoup plus parlant à mon sens que l’Hypnotiseur). Il alterne là-encore des points positifs et négatifs. Je vais commencer par les positifs : la raison pour laquelle il passe du côté obscur : la dépendance des humains aux héros, puisque pour lui les héros ne peuvent sauver tout le monde, il est effrayé par la dépendance des civils aux héros et par la faiblesse humaine (référence à son passé douloureux puisque ses parents meurent alors qu’il comptait sur Gazerbean pour les sauver). Je dois dire que j’ai trouvé cet événement et ses motivations bien recherchés mais ce qui pêche pour moi c’est au niveau de la construction de son personnage qui n’est pas assez travaillé, il arrive de manière un peu trop abrupte, dès sa première apparition on se rend compte tout de suite que ce personnage est différend. On entend parler de lui au début du film avec l’attaque du train mais ça s’arrête là. Et je trouve qu’il souffre de la comparaison avec Syndrome qui est moi le meilleur antagoniste Pixar et l’un des meilleurs jamais crée : qui lui prend le temps de mener à bien sa vengeance. Ici j’ai eu l’impression de n’avoir aucune planification à long-terme. Et du coup ça se ressent sur le faible impact qu’il laisse à la fin du film.
Autre élément « négatif », c’est là-encore la rapidité du dénouement final entre la neutralisation des supers contrôlés et le bateau stoppé à la côte, je trouve que c’est allé un peu trop vite, faisant passer les six nouveaux supers pour des faibles. Un autre aspect important est le manque d’aspect dramatique à mon goût que je n’ai ressenti qu’à une seule reprise dans ce film, alors que Syndrome arrivait à procurer en montrant leur impuissance face à telle ou telle situation (en les faisant regarder la ville qu’il s’apprête à détruire par exemple).
Cependant le « combat final » entre Elastigirl et l’Hypnotiseur fut passionnant à suivre.


Voilà pour les éléments « moins bien » du film, mais il y a d’autres événements positifs comme la double-lecture qui est toujours présente que ce soit au niveau des motivations de l’antagoniste que je trouve assez adulte, il y a encore la discussion entre Hélène et Evelyn portant sur l’industrie qui est intéressante mais aussi l’aspect géopolitique où les pays du monde entier se réunissent pour voter des lois concernant les supers à l’échelle de la planète. Je peux citer aussi la morale de l'histoire : la dépendance aux écrans et au fait que les Hommes n'accomplissent plus rien directement, ils passent par des intermédiaires en contournant les difficultés. J’ai trouvé ces éléments originaux et très bien amenés.
On note aussi l’hommage au film d’espionnage quand le bateau que personne ne contrôle fonce à toute vitesse vers la côte de la ville.
Ce film a également permis de voir plus du quotidien des enfants et de la famille et ça j’ai énormément apprécié cette facette du film puisque ça donne au film des scènes d’anthologie de dispute, crise de nerfs : la scène où Violet pique sa crise, où Jack-Jack se bat avec le raton-laveur ou encore celle du restaurant. Ce sont toujours des scènes dynamiques où l’interaction entre les personnages est habilement exécuté et font partis des scènes les plus réussis du film. Les clins d’œil au premier film sont nombreux : comme Hélène qui stoppe un train mais en n’utilisant une méthode différente de celle de Bob, Hélène présente dans un avion, l'embauche par un milliardaire...


La musique de Michael Giacchino est encore très efficace et accompagne à merveille les faits et gestes de nos supers préférés. J’ai un coup de cœur pour « Consider Yourselves Undermined » au début du film contre le Démolisseur qui mêle l’enthousiasme de la famille à sauver la ville ainsi que la situation d’urgence dans laquelle il se trouve puisque la musique à un rythme assez effréné. Mais aussi « Train of Taut » où Elastigirl nous offre un magnifique spectacle sur sa moto. On ressent vraiment le suspense à travers ses notes de musique, tout comme dans « Ambassador Ambush » où les cuivres s’entremêlent de façon épique. La douceur de « Hero Worship » ressort également clairement. « Searching for a Screenslaver » alterne le suspense de la traque que mène Hélène jusqu’à la confrontation qui s’avère vraiment intense. Ensuite il y a « Hydrofoiled Again » pour l’infiltration sur le bateau et aussi la musique du combat entre Violet et Voyd qu’il accompagne à merveille, en plus il y a les notes de « Kronos Unveiled » ! Puis il y a « A Bridge Too Parr » lorsque les Bob, Hélène et Lucius sont contrôlés mêlant le « drame » au « fun » vers la fin. Et enfin la mythique « Out and a Bout » qui clôt parfaitement le film, lorsque Violet laisse Tony devant le ciné. Je ne pouvais pas faire cette critique sans parler de « Incredits 2 » qui illustre les merveilleux concept-art du générique de fin en reprenant les thèmes les plus iconiques des deux films. La musique de la série Elastigirl est elle aussi un délice jazzy pour les oreilles, tout comme celle de Frozone et de M.Indestructible. Giacchino a eu une formidable idée d’en faire des génériques à la façon des années 50-60.
Le doublage est lui aussi satisfaisant mais tout de même un cran en-dessous du précédent film qui était un sans-faute.
La fin du film est vraiment parfaite puisqu'elle finit une nouvelle fois avec un cliffhanger mais avec un clin d’œil à la scène d'ouverture du premier film, sauf que là la famille est réunie.


Bref ce film est un parfait mélange de scènes d’action époustouflantes, ainsi que des scènes de la vie quotidienne qui font toujours mouche que ce soit au niveau de l’écriture des dialogues, ou de l’humour grâce à un formidable travail sur le traitement des personnages, sublimé par la musique de Michael Giacchino et le formidable travail de Brad Bird et de ses animateurs au niveau de la réalisation, de la photographie, du cadrage, des décors et des sons. Une suite digne du premier épisode et une des meilleures suites de Pixar à ce jour ! Il arrive à redépoussiérer le genre super-héroïque de fort belle manière. Si la raison voulait que je mette 8 <3, mon cœur a finalement opté pour le 9 <3, tellement j'ai été heureux de retrouver ma famille préférée.


Peut-être qu’on aura un troisième épisode, mais s’il te plaît Brad, n’attends pas 14 ans supplémentaire pour la faire, je n’ai pas envie d’attendre 2032 !!

Oromis
9
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le 4 juil. 2018

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Oromis

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