Pari réussi !

Il y a quelque chose de complètement déjanté dans ce film et c’est ce qui le rend absolument génial.

L’histoire des Nouveaux Sauvages est plurielle et, à la fois, englobante. Plusieurs scénettes s’enchaînent les unes entre elles. Au début du film, on est légèrement perdus. On cherche le lien entre la première scène du crash d’avion et ces nouveaux personnages qui apparaissent ensuite dans un restaurant. On imagine un probable retour en arrière explicatif de ce fameux crash. Rien de tout ça ! On comprend donc très vite que Les Nouveaux Sauvages fait partie des « films à sketches », que chacune des histoires sont sans lien direct avec les précédentes, mais qu’elles tournent toutes autour d’une même thématique. Il y a cet homme psychologiquement instable qui rassemblera toutes les personnes qui ont croisé son chemin pour qu’elles connaissent un aller sans retour, cette femme qui se laisse embarquer dans la folie meurtrière de sa collègue de travail, ces deux hommes qui iront jusqu’à s’entretuer, ne parvenant pas à canaliser leurs pulsions animales, ou encore cet homme qui en veut à la société et prendra le risque de tout perdre pour aller au bout de ses idées. Les Nouveaux Sauvages nous parlent donc de cette folie douce qui sommeille en chacun de nous et qui nous rend capable du pire.

Il y a quelque chose de complètement déjanté dans ce film et c’est ce qui le rend absolument génial. On se laisse embarquer par ces personnages tous plus fous les uns que les autres et par la trajectoire cauchemardesque que prend leur existence. On reconnaît l’empreinte caractéristique des films de notre génie espagnol Almodóvar et on ne s’étonne pas d’apprendre qu’il a produit le film. Finalement, on n’est pas tant dérangé par le découpage qui est exécuté. Le sujet traité voulait que plusieurs facettes soient montrées, qu’on nous présente des psychologies différentes. Ainsi, on peut retrouver une proximité avec des situations que l’on aurait connues, ou se reconnaître dans certains personnages. Chacune des scènes apporte sa touche au film. Aucune ne semble de trop ! Chaque chute est soignée. Cela ne finit jamais en queue de poisson. Le tout est cohérent et cela permet de donner un sens particulier au film en lui-même. A la fin, on se dit que l’objectif du réalisateur est atteint. On comprend parfaitement ce qu’il a voulu montrer et pourquoi. Le casting est, par ailleurs, nettement à la hauteur. Les comédiens incarnent tous à la perfection cette fine barrière qu’il y a entre le bien et le mal, entre la folie et la raison. Evidemment, le film pourra trouver quelques réfractaires, notamment par son côté très décalé, mais la thématique traitée est néanmoins assez universelle pour que chacun y trouve son compte. Le pari était assez risqué : remettre au goût du jour un genre cinématographique quelque peu oublié, que l’on voyait plutôt dans les années 60 – en dehors peut-être du récent Les Infidèles qui permet un comparatif actuel –, n’était pas une mince histoire. Pourtant, on peut dire que le pari est amplement réussi : le film est tout en légèreté, sans aucune longueur. Les différentes histoires auraient pu être redondantes, mais ça n’a pas été le cas.

Un grand bravo à Damián Szifrón, ce réalisateur argentin encore méconnu qui débute sa carrière avec brio !