Observation de l'animal dans son milieu naturel

Ayant raté sa semaine d'exploitation au moment de sa sortie, j'ai bénéficié d'une séance de rattrapage à l'occasion d'un cycle découverte "langue espagnole" dans le cinéma que je squatte.

L'argument du film : voir des gens péter les plombs via quelques sketchs indépendants les uns des autres, avait de quoi faire penser à une comédie de moeurs satirique et grinçante. Or, Les Nouveaux Sauvages, c'est bien plus que cela car justement, la structure et la forme adoptée par le réalisateur Damián Szifron permettent une variété de tons où l'humour le plus noir et Tex Avery-esque côtoie le grave ou le tragique, allant jusqu'au pathétique et au grand guignol dans son sketch final.

Ce qui semble intéresser le réalisateur ici, ce n'est pas la galerie de personnages qu'il nous présente, ni particulièrement sympathiques ni très positifs, chacun poussé à bout, jusqu'à abattre leurs garde-fous moraux. Pire, beaucoup d'entre eux l'ont bien cherché et subissent eux-même les conséquences de leurs actes fous. Non, Damián Szifron dresse plutôt un état des lieux de l'atmosphère de violence qui pèse sur leurs épaules et les contraint à se lâcher, qu'elle soit physique, bien évidemment, morale, sociale (via la pression des institutions étatiques), économique ou encore exprimée par la lutte des classes ou la tyrannie des sentiments. Ainsi, chacun des sketchs fait monter la pression et charge la mule, jusqu'à atteindre le point de non retour pour le personnage qui cède à ses plus bas instincts. Le réalisateur ausculte par la même occasion les conséquences de ce déchaînement, tant dans leurs aspects les plus néfastes que, parfois, leurs "avantages", comme en témoigne le sketch final, aussi fou que jetant un regard un poil plus bienveillant sur son couple foutraque.

Intéressant et divertissant par la variété des situations qu'il propose et la multiplicité des points de vue, la seule chose que l'on peut reprocher à ces Nouveaux Sauvages est la longueur de certaines de ses séquences, qui auraient pu être raccourcies pour éviter de perdre en route, parfois, la percussion et la pertinence de son propos. Mais il s'agit là d'un défaut mineur qui ne pourra ternir le plaisir éprouvé devant l'oeuvre.

Une petite dédicace à vous, jeune fille, qui vous êtes assise à un fauteuil de moi et qui, par votre doux parfum fleuri et vos petits éclats de rires mutins, avez réchauffé mon coeur. Même si je sais, au fond de moi, que j'en aurais jamais sans doute eu le courage, j'aurais tellement voulu vous remercier, mais vous êtes hélas partie trop vite, dès les premières notes du générique final.

De si jolies rencontres sont malheureusement réservées aux films de cinéma...