Inspiré d'une nouvelle de Dostoïevski (Les quatre nuits d'un rêveur, également adaptée plus tard par Robert Bresson et qui a aussi inspiré James Gray pour Two Lovers ), Nuits blanches représente une parenthèse romantique dans l’œuvre de Visconti, entre le lyrisme glacé de Senso et le réalisme désespéré de Rocco et ses frères. Par une nuit d'errance solitaire, Mario (Marcello Mastroianni) fait la connaissance d'une jeune fille, Maria Maria Shell), qui pleure, accoudée au parapet d'un canal. Ils se donnent rendez-vous les soirs suivants, au même endroit. Au fil des rencontres, la jeune fille va lui confier son secret: elle attend le retour de son grand amour, « le Locataire», qui lui a promis de revenir la chercher. Entre le réalisme poétique d'un Carné et la touche onirique d'un Cocteau, Nuits blanches apparaît d'abord comme un éblouissement visuel avec ses décors brumeux photographiés dans un noir et blanc subtilement nuancé par Giuseppe Rotunno. Entièrement tournée en studio, cette étrange histoire d'amour fait figure de conte nocturne tendre et touchant jusqu'à un final déchirant qui en rompt le charme un peu suranné. Mastroianni révèle ici pour la première fois une facette plus intime de son talent à travers ce personnage de soupirant introverti qui ira cherche unn réconfort fugace dans les bras d'une prostituée (Clara Calamai l'actrice principale des Amants diaboliques, le premier film de Visconti). Quant à Maria Shell, moins larmoyante qu'à l'habitude, elle campe une Maria romantique, à la fois naïve et déterminée. Seule erreur de casting, la présence d'un Jean Marais hiératique et glacial dont on s'étonne qu'un jeune fille puisse s'éprendre à ce point. Comme le soulignait Piero Tosi, le fidèle costumier de Visconti, ce personnage du "locataire" n'aurait jamais dû être montré à l'écran: le film aurait gagné encore en mystère, alors que ces flashbacks par trop explicatifs cassent l'ambiance poétique si particulière du film.

SteinerEric
8
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le 21 déc. 2024

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Eric Steiner

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