Trois ans après Oranges Sanguines le réalisateur Jean-Christophe Meurisse revient titiller le rire nerveux et un peu gênés des spectateurs avec Les Pistolets en Plastique, un film qui s'inspire vaguement de l'affaire du fait divers concernant Xavier Dupont de Ligonnès. Si dans son ensemble le film est assez inégal il m'a tout de même procuré les rires les plus sincères de cette année 2024.
L'histoire est donc celle du destin croisé de plusieurs personne autour d'un homme qui a tué toute sa famille avant de disparaître de la circulation. Deux enquêtrices amatrices, un flic en vacances, un quidam qui sera confondu avec le tueur et l'assassin lui même se la coulant douce en Argentine sont donc les principaux protagonistes de cette funeste et singulière histoire.
La multiplication des points de vue entre les différents personnages et un récit qui ne cesse de passer de l'un à l'autre donne au film un aspect parfois un peu morcelé et décousu. Cette sensation sera encore renforcée par le fait que de nombreux acteurs et actrices dans des rôles secondaires viennent faire leur numéro le temps d'une scène donnant aussi l'impression d'une succession de sketchs reliés par le film rouge de l'histoire. La structure et le ton m'ont parfois fait penser à Dikkenek de Olivier Van Hoofstadt surtout que comme le réalisateur belge Jean-Christophe Meurisse semble aimer la médiocrité bien crasse de ses personnages et la méchanceté de l'humour involontaire qu'ils trimballent avec eux. J'aime tout particulièrement les deux enquêtrices Facebook amatrices formidablement interprétées par Charlotte Laemmel et Delphine Baril qui forment un génial duo de comédie tout en épinglant les obsessions parfois malsaines des enquêteurs 2.0 pour les faits divers sordides. En tout cas je signerai tout de suite pour une série avec les deux personnages tant l'alchimie claudicante entre cette blonde grande gueule et cette brune timide fonctionne parfaitement. L'autre personnage qui marque les esprits est Michel interprété par Gaëtan Pau, une sorte de beauf désagréable et suffisant qui sera arrêté au Danemark car confondu avec le tueur et qui vivra un délicieux calvaire pour nous spectateurs. Mais le meilleur se trouve sans doute dans les personnages secondaires interprétés par une belle brochette d’invités (François Rollin – Romane Bohringer – Jonathan Coen – Nora Hamzawi- Vincent Dedienne – Aymeric Lompret – Philippe Rebbot) et qui nous offre de très réjouissants moments de comédies. Ma préférée reste lorsque nos deux apprentis enquêtrices rencontre une concierge (Lula Hugot) qui débite en un temps record et avec une aplomb confondant de bêtise une kyrielle ininterrompu de cliché racistes, de remarques homophobes et de propos douteux et haineux qui finissent par discrédité dans un grand éclat de rire la stupidité de ces pensées immondes. J'aime aussi beaucoup la scène durant laquelle deux flics français débraillés (Vincent Dedienne et Aymeric Lompret) tentent de communiquer en visioconférence avec leurs homologues danois tirés à quatre épingle. Le contraste renforcé par un joli travail de mise en scène fonctionne parfaitement, Jean-Christophe Meurisse confrontant l'univers stricte, carré et immaculé d'une police danoise parfaitement bilingue avec deux flics français rigolards dans un bureau bordélique tentant d’articuler trois mots d'anglais comme un mauvais élève de quatrième. Les Pistolets en Plastique fonctionne un peu comme ça par accoues mais il fait partie de ces films dont on adore se remémorer les séquences même longtemps après la fin du visionnage.
Fatalement de par sa structure même le film n'est pas toujours d'une grande régularité et il faudra accepter de se confronter à des séquences moins fortes et moins drôles même si rien ne vient totalement plomber l'ambiance. On pourra donc tiquer sur quelques séquences moins percutantes, sur quelques moments durant lesquels les vedettes semblent faire leur petit numéro et le manque de continuité du récit. On sent également que le film verse parfois (mais fort heureusement rarement) dans une sorte de provocation un peu gratuite comme avec la scène choc du film qui me semble loin d'être indispensable.
Dans l'ensemble Les Pistolets en Plastique offre un spectacle vraiment réjouissant pour les amateurs d'humour affreux, sale et méchant. Jean-Christophe Meurisse nous propose un sale spectacle parfois très drôle et si Les pistolets en Plastique tirent à blanc ils font souvent mouche dès qu'ils visent juste au registre de la bêtise humaine et de l’humour noir.