A l'ombre d'un petit jardin où l'on cultive assidûment les marrons

Eric est un petit gars un peu nerveux, du genre à te casser les dents si tu lui offres un briquet, à s’enduire le torse de lotion pour bébé pour mieux tataner du maton quand ces derniers tentent de le raisonner avec leurs boucliers. Mais Eric, fraîchement arrivé dans la version avec barreaux et pour adultes de la maison de correction d’où il a été transféré, après avoir éclaté le high score en matière de bourre-pifs, c’est surtout le rejeton de Ned. Un taulard qui a su se faire sa place dans la nouvelle taule qui voit débarquer son fiston et qui compte bien profiter de l’arrivée de ce dernier pour faire connaissance avec celui qu’il avait du abandonner, alors qu’il était tout gamin, quand il fut placé à l’ombre.

C’est cette relation entre père et fils qui démarque Les poings contre les murs de l’habituelle tambouille faite de mitards et d’attaques vicieuses sous les douches qui sont les points d’arrêt classiques du genre. Et si la proposition de David Mackenzie n’échappe pas à tous les gimmicks du film de prison, elle est pourtant porteuse d’une réflexion personnelle qui lui donne une densité toute autre. Le bel échange qui se joue à l’écran entre Jack O’Connell, impressionnant de bestialité, et Ben Mendelsohn, son patriarche un peu trop franc du collier, monte en puissance sans s’annoncer pour trouver une belle dimension émotionnelle lorsqu’il conclut le film, par une petite touche d’optimisme bienvenue.

Pour le reste malheureusement, c’est un peu court et parfois beaucoup trop cliché : difficile de croire à ces sessions de groupe notamment, dont les protagonistes manquent cruellement d’ampleur. Rien n’est réellement loupé, mais il manque la petite fougue singulière qui permettrait au film d’être plus cohérent dans ses intentions. En l’état, il est tout de même porté par des comédiens très investis, il est mis en scène sans esbroufe mais de façon efficace et bénéficie d’un rythme parfaitement géré.

Si David Mackenzie avait su éviter l’habituel combat entre direction aveugle, matons corrompus et éducateur idéaliste inflexible, Les poings contre les murs aurait pu trouver percussion encore plus forte. Mais en sabrant la plupart de ses personnages au profit d’Eric et son père, le jeune cinéaste peine à entretenir l’à côté de la relation père-fils qu’il déploie. Dommage, le potentiel uppercut rageur était là, on se contentera d’un one shot habité d’une belle volonté de proposer quelque chose d’un peu différent, mais un peu trop timide pour rester dans les esprits.
oso
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le 7 oct. 2014

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