Jean François Davy est un réalisateur/producteur/scénariste qui dans les années 70 s'est beaucoup interrogé à travers ses films sur la libération sexuelle, la pornographie et le plaisir et ceci à travers de nombreux reportages et documentaires tels que la série des films Exhibition mais aussi Prostitution sorti en 1975 . Dans cette même veine sortira en 1976 Les Pornocrates dans lequel le réalisateur interroge les différents acteurs qui gravitent autour du monde du cinéma érotique et pornographique à une époque ou ce genre de films sortaient encore en salles avec affiches et titres salaces visibles en pleine rue.
Si Les Pornocrates existe dans une version light de 45 minutes expurgée de ses scènes explicites sous le titre de Plainte Contre X, la version intégrale comprend donc mathématiquement 45 bonnes minutes de séquences purement pornographiques réservant bien sûr le film à un public averti.
Le film de Jean François Davy ressemble finalement plus à une sorte de journal de bord, voir de document de tournage qu'à une véritable réflexion globale autour de la pornographie . On aurait par exemple aimé avoir l'avis et le sentiment d'autres réalisateurs de cette époque sur la révolution sexuelle sur grand écran. Car sans aller jusqu'au même enthousiasme extrême que le réalisateur Paul Vecchiali qui déclare dans Les Pornocrates que même le pire des films X qui se tourne dans les années 70 est plus important pour le cinéma que le nouveau film de Claude Sautet écrit par Dabadie, il faut bien reconnaître que fatalement le X bousculait à l'époque tous les tabous de la société. Ce qui marque le plus en regardant Les Pornocrates c'est peut être ce côté fesses joyeuses au sein d'une industrie qui ne cessera ensuite de glisser vers le sordide comme le montre l'excellent documentaire de l'actrice et réalisatrice Ovidie Pornocratie, Les Nouvelles Multinationales du Sexe de 2017, véritable antithèse du film de Jean François Davy. Mais revenons en 1976 pour des tournages qui se déroulent dans une bonne humeur libertaire assez réjouissante et dans lesquels acteurs et actrices se connaissent, se respectent et s'amusent ensembles entre sexe et fous rires. Si pour les acteurs les motivations tiennent autant de l’exhibitionnisme pur et dur que du plaisir de gagner de l'argent en passant du bon temps, on notera chez quelques actrices le syndrome du désir de cinéma traditionnel perdu sous le besoin de travailler pour gagner sa vie, mais encore une fois bien loin de l'exploitation un peu sordide de jeunes filles qui existe aujourd'hui dans l'industrie pornographique. On retrouve dans le film Claudie Beccarie véritable égérie de Jean François Davy mais aussi un Richard Allan alors jeune débutant qui deviendra par la suite une légende de la pornographie française avec plus de 150 film et un surnom choupinet de Queue de Béton et puis Sylvia Bourdon qui tournera par la suite avec Jean Rollin (Lèvres de Sang)
Le film de Jean François Davy est ainsi truffé de moments plutôt amusants comme lorsque le réalisateur dirige façon chef d'orchestre un doublage de scène de jouissance ou qu'un peintre affichiste s'amuse à dire que dessiner une femme nue ça change un peu de la tête de De Funes. Le moment le plus drôle reste pourtant l'exploration d'une salle de cinéma spécialisée dans la pornographie avec quelques interviews savoureuses comme celle de l'ouvreuse aux anecdotes croustillantes mais qui préfère tout de même les spectateurs de films X que les fauteurs de troubles dissipés des amateurs de Western. L'occasion de rencontrer le type avec l'excuse la plus bidon du monde qui explique qu'il rentre dans la salle juste pour se réchauffer parce qu'il fait trop froid dehors. Jean François Davy interroge aussi deux gamins plutôt incrédules et assez drôles devant la façade d'un cinéma X arborant pignon sur rue des affiches aux titres suggestifs. D'autres moment m'auront bien fait sourire comme lorsqu'en plein tournage une comédienne se met à bouder comme une gamine après que Claudie Beccarie (Exhibition) se soit moquée d'elle et de son approche personnelle et technique de la fellation. Et même si le film n'évite pas quelques séquences un peu plus malaisantes comme ce vieux monsieur et agent qui vient « vendre » ses nouvelles filles comme un proxénète, dans l'ensemble Les Pornocrates donne une vision plutôt joyeuse, libertaire et amusante du cinéma X de l'époque et de leurs tournages.
Les Pornocrates est un sympathique documentaire sur les prémices de l'âge d'or du cinéma X et sur une époque ou le genre était encore abordé sous l'angle du divertissement cinématographique. Près de 50 ans après on ne pourras que constater à quel point l'artisanat joyeux a laissé sa place à une industrie capitaliste, mondialiste et bien moins réjouissante. D'une époque qui pensait le X-mène à tout il ne reste que le X-Manne financière.
Petit PS : C'est moi qui ai l'esprit mal placée ou sur l'affiche du film devant le visage de Claudie Beccarie vers sa bouche en bas à droite on a l'impression de voir une grosse bite en érection dans la même inclinaison que le nez et le cigare du dessin ??