Le tournage orageux de ce film a failli ruiner la MGM qui le produisait, et a plombé l'ambiance du plateau qui devint délétère, en grande partie à cause des caprices de Brando qui se comportait en star exigeante, qui refusait de participer aux répétitions, et n'hésitant pas à se disputer avec son partenaire Trevor Howard et son metteur en scène Lewis Milestone qui venait de remplacer Carol Reed... Plus de 50 ans après, le film peut être vu avec plus de sérénité. De nombreux critiques cinématographiques ne cessent de complimenter la version de 1935, avec Clark Gable et Charles Laughton pour son acuité du drame humain et psychologique qui selon eux, fait défaut à cette version diluée dans le grand spectacle. Certes l'aspect grand spectacle est bien là, on voit les dollars sur l'écran, et ça les vaut, mais je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette théorie. Cette version 62 possède de nombreux atouts : l'affrontement entre l'odieux Bligh et Fletcher Christian est bien entretenu, l'exotisme des scènes tahitiennes est superbe, la maîtrise des scènes maritimes, le "nouveau" Bounty reconstruit fidèlement en Nouvelle-Ecosse par la production, la beauté des images, la musique majestueuse de Bronislau Kaper, le reste du casting plutôt brillant, et surtout la force de cette histoire authentique contribuent à la formidable réussite de ce somptueux film d'aventure. Et quoi qu'on en dise, malgré son caractère exécrable et ses tics d'Actor's Studio, Marlon Brando en vrai monstre sacré, fait le job. Il serait donc dommage de renier cette magnifique évocation historique en couleurs et cinémascope.