Il y a quelques mois nous évoquions Broken Land (Barbey, Peter, 2014), représentation de la vie quotidienne à la frontière séparant le Mexique et les Etats-Unis, sous l’oeil des citoyens des Etats-Unis d’Amérique. Ceux qu’on appelle communément « les migrants » n’y étaient vus que de très loin, furtivement, comme l’on aperçoit ça et là, surgissant dans la nuit, l’une ou l’autre bête sauvage. Allégorie animale du migrant, qui donnait une idée du rapport que les frontaliers états-uniens entretiennent avec ceux qui essayent de passer de l’autre côté de la barrière. Avec Les Sauteurs, nous nous déplaçons sur une autre frontière, celle qui sépare l’Afrique de l’Europe, dans une enclave espagnole sise au Nord du Maroc (Melilla). Le point-de-vue est strictement opposé à celui de Broken Land. Nous sommes au plus près de ceux qui, depuis différents pays d’Afrique, tentent de rejoindre l’Europe. Plus précisément, nous sommes entre les mains d’Abou Bakar Sidibé, cinéaste improvisé, après que Moritz Siebert et Estephan Wagner lui aient prêté une caméra afin de saisir au plus près « la vie du camp ». À la caméra enchaînée de Broken Land, celle du pouvoir, celle du chasseur, celle du télé-surveillant, s’oppose la caméra déchaînée des sauteurs, celle de ceux qui ne cessent de grever l’attente par le possible, de sauter différentes régions du réel avec la force de l’imaginaire.
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