Sharkwater est à la fois un documentaire US emphatique conventionnel et le manifeste brouillon d'un engagement, avec des prises de risques et un journal de la part de Rob Stewart. Ce jeune photographe et animalier est parti en croisade en faveur des requins – il manque d'y perdre une jambe pendant le film, qui se déroule dans les eaux d'Amérique centrale. Les requins sont le thème unique avant l'envoi de la charge et l'ajout de quelques espèces. Paul Watson est de la partie ; cet activiste anti-braconnage aura suite à cette expérience sa série Whale Wars sur Discovery Channel – preuve parmi d'autres du retentissement du film.
Le premier pari est de réhabiliter les requins. Ils ne sont pas si dangereux, c'est eux qui ont peur, sont menacés et utiles ; mieux, ce sont les « prédateurs parfaits » pour l'équilibre et la prospérité des fonds marins. Le spectateur apprend également qu'il s'agit d'une des plus vieilles créatures existantes (et n'a quasiment pas changé). L'essentiel des informations naturalistes tient en quelques renseignements très concentrés (au début). Pour le reste, Sharkwater livre beaucoup d'assertions autour des mêmes faits et de comptes-rendus centrés sur les individus en expédition. Il insiste sur l'oppression menée par l'Homme sur les requins et les risques pour lui-même, sous un délai rapide.
La principale dénonciation est celle du 'shark finning'. La chasse sert à concocter de la soupe aux ailerons de requins (mets de luxe en Asie) et à soutenir un commerce pharmaceutique (le mépris du détail engendre la décence par omission). La corruption des autorités de Taïwan et du Costa Rica envers les trafics sont affichées, les démêlées judiciaires pendant le tournage évoquées superficiellement. L'égoïsme destructeur des pêcheurs aux Galapagos (rapport aux quotas et à la sécurité physique) est dénoncé. Les mers sont le théâtre de massacres quotidiens. Elles affectent d'autres espèces : des images DV montrent des tortues exécutées comme du bétail de basse-cours.
À cause des urgences probablement, le récit repose sur des formules répétitives. L'océan comme source d'oxygène est asséné plusieurs fois (dans la continuité de La Planète Bleue, version cinéma d'une série de la BBC, qui se contentait d'une alerte après avoir lancés les arguments d'une beauté réjouissante). Le style (montage, narration) est assez vulgaire (la BO est le plus sophistiqué et contient du Portishead), les séquences et diapos avec Stewart vaines et hors-circuit. Ses exhibitions de grand garçon christique sont assez incompréhensibles, mais positivement sidérantes pour qui veut se laisser interpeller.
L'appel à une défense internationale de l'environnement est comparable à celui lancé plus tard par Home d'Arthus-Bertrand. Malgré ses angoisses le film est optimiste : les réactions du grand-public et les progrès sont possibles. Ces derniers tiennent à des lois restrictives : c'est la solution 'pleine' la moins policière et la meilleure. Tout de même Watson glisse que les masses n'ont jamais rien secoué dans l'Histoire, la contestation passant par les individus ou petits groupes actifs.
https://zogarok.wordpress.com/2017/01/17/les-seigneurs-de-la-mer-sharkwater/